Les élus alsaciens y voient une «renaissance» de leur territoire. L’Assemblée nationale va adopter, ce mercredi après-midi, le projet de loi créant la Collectivité européenne d’Alsace. Deux ans et demi après l’absorption de la région dans le nouvel ensemble du Grand Est, le texte fusionne les départements du Haut-Rhin et du Bas-Rhin, et confère à la collectivité unique des compétences spécifiques. Questions à Brigitte Klinkert, présidente (LR) du Conseil départemental du Haut-Rhin.
Qu’est-ce qui va changer pour les deux départements alsaciens ?
C'est la renaissance d'une Alsace institutionnelle et politique qui n'existait plus depuis la création des grandes régions. Le gouvernement s'est rendu compte que le désir n'en avait jamais disparu. La Collectivité européenne d'Alsace va cumuler les compétences actuelles des deux départements, et en recevoir d'autres. Elle sera officiellement mise en place au 1er janvier 2021, mais nous recevrons dès la promulgation de la loi, sans doute en septembre, la compétence tourisme et l'usage de la «marque» Alsace.
Techniquement, il s’agira toujours d’un département ?
S’agissant de la base juridique, oui. Il ne s’agira pas d’une collectivité à statut particulier. Et les deux départements restent en place en tant que structures administratives de l’Etat. Mais c’est bien plus qu’une fusion, pour laquelle nous n’aurions pas eu besoin ni d’un accord signé par le Premier ministre à Matignon ni d’une loi. Aucun autre département n’aura de compétences aussi fortes et particulières. Nous ferons partie des cinq collectivités ayant fait l’objet d’une loi dédiée, avec Paris, Lyon, Marseille et la Corse.
Quelles sont ces nouvelles compétences ?
La collectivité sera cheffe de file du transfrontalier, une compétence pour l’instant partagée ente l’Etat et la région Grand Est : c’est-à-dire qu’elle coordonnera tous les acteurs pour agir avec nos voisins du Bade-Wurtemberg et de Suisse. Nous récupérons également la gestion des routes nationales et des autoroutes non-concédées, ce qui nous permettra de mettre fin au scandale de l’engorgement de l’A35, l’axe nord-sud de l’Alsace, éventuellement au moyen d’une taxe poids lourds. Nous agirons enfin pour le bilinguisme français-allemand : en développant l’apprentissage de la langue, en multipliant les contacts entre nos jeunes et de jeunes Allemands, nous leur ouvrirons le marché professionnel d’outre-Rhin.
Certains critiquent la multiplication des statuts particuliers, la jugeant contraire à l’unité de la République…
Nous y voyons, nous, un laboratoire de la décentralisation, le droit de construire notre trajectoire en fonction de notre spécificité. Nous aurions d’ailleurs souhaité plus de compétences, mais c’est une première étape et il y en aura d’autres, notamment avec le droit à la différenciation qui sera ouvert dans le cadre de la réforme constitutionnelle.