«Vendredi à la mi-journée, les résultats du bac ont été partout affichés», se félicitait le ministère de l'Education. Oui, mais à quel prix ? Voici le témoignage Céline Vaguer, présidente de jury du bac à Montauban et maitre de conférences à l'université Jean-Jaurès de Toulouse. En tant qu'universitaire, elle a pour mission de présider un jury de bac : entourée de professeurs de secondaire, elle est chargé de vérifier chaque note pour éviter les erreurs de saisie, rouvrir le dossier de l'élève et si besoin statuer sur des demi-points supplémentaires. Et surtout, aposer sa signature, comme pour un tampon officiel validant le diplôme. Sauf que cette année, rien ne s'est passé comme prévu. Elle témoigne pour Libération :
«Je suis amère. Comment ne pas l’être. Après discussion entre les membres du jury, nous avons décidé collectivement de ne pas délibérer, les règles de procédure de base n’étant pas garanties. Mais ce vendredi matin, surprise : les résultats des élèves étaient affichés. Qui a validé les relevés de notes ? Comment ? En se basant sur quoi ? Des notes ont-elles été modifiées pour permettre à certains élèves d’aller aux oraux, d’avoir une mention ? Lesquelles ? Nous sommes au-delà de la légalité, il est question de valeurs. D’égalité, mais aussi d’honnêteté et de transparence pour les candidats : deux lycéennes m’expliquaient avoir des «notes provisoires» – je préfère dire «notes factices»... sans qu'il soit précisé dans quelle matière. Comment peuvent-elles s'organiser pour leurs oraux de rattrapage lundi ? Un doute subsiste : avec les notes réelles, peut-être auraient-elles eu le bac aujourd’hui.
Pour le ministère, il fallait afficher des résultats ce vendredi à tout prix. Mais pourquoi ? On aurait pu décaler la publication à lundi (on l’a bien fait pour le brevet et la canicule), les professeurs auraient rendu les copies manquantes. Je suis consternée. J’avais besoin de le dire publiquement. De signifier que, non, je n’ai pas participé à cette mascarade. D’abord, pour les élèves : qu’ils sachent que je n’ai rien validé en tant que présidente. Et pour moi aussi, pour être en accord avec mes valeurs, quoi qu’il m’en coûte. En tant que présidente de jury, j’engage ma responsabilité morale, mon éthique. Ce n’est pas un acte anodin. C’est un rôle important qui donne au bac toute sa valeur. En se comportant de la sorte, le gouvernement le dévalorise et lui fait perdre sa dimension de diplôme national.»
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