Delphine Batho n'a pas peur des mots. A Ivry-sur-Seine, la députée des Deux-Sèvres prévient son monde : «C'est un moment historique.» De fait, elle n'est pas venue seule. Autour de Batho (Génération écologie), plusieurs figures de l'écologie politique, notamment Antoine Waechter (Mouvement écologiste indépendant), et bien sûr la star du moment Yannick Jadot (Europe Ecologie-les Verts). Détendu, chemise blanche et lunettes de soleil. «Nous affichons notre détermination à combattre ensemble, nous serons unis aux municipales sur une base écolo, écolo et écolo pour prendre le pouvoir et l'exercer avec les citoyens», dit l'eurodéputé, fort des 13,5% de sa liste EE-LV. Le lieu du rendez-vous ne tombe pas du ciel. Les Verts ont convié la presse devant l'incinérateur du Val-de-Marne, à quelques pas du périphérique. Un lieu fortement déconseillé aux asthmatiques… Pour les chefs de file de l'écologie, il s'agit de soutenir le collectif qui s'oppose au projet de reconstruction de cet incinérateur qui arrivera en fin de vie en 2023. Mais, pas que…
La petite bande était divisée lors des européennes. Aujourd'hui, elle se regroupe, elle ne souhaite pas se laisse enfermer dans les questions des alliances à gauche et veut le faire savoir. Ils prennent donc la parole les uns après les autres pour se projeter dans l'avenir qu'ils imaginent écologique, forcément : la prise de pouvoir à tous les échelons est possible, disent-ils en chœur. Pour les municipales, aucune règle contraignante. Les écolos ouvrent la porte à tous ceux qui «partagent» leur combat. «On ne veut pas d'un truc bizarre avec des statuts, nous ce qu'on propose, c'est de rejoindre une dynamique.» Delphine Batho acquiesce. Ils étalent leur idéal : des listes qui se forment dans les petites communes et les grandes villes autour de l'écologie. «Nous voulons être au-delà de la gauche, au-delà de la droite, nous, on souhaite être le mouvement dominant», argumente François Damerval, représentant du parti Cap 21.
«Faire les choses dans l’ordre»
Delphine Batho ne cache que la prochaine présidentielle figure dans leur viseur. «Il y aura un très gros travail programmatique», dit-elle. La petite bande désire mettre au monde une fédération afin de «rassembler plus large» dans un second. «Nous devons faire les choses dans l'ordre», explique Yannick Jadot. Mais la discussion, prévient-il, ne devra pas «ressembler à un conseil d'administration». Une façon de dire à la gauche, qui pour l'écologie a désormais les yeux de Chimène, que la dynamique ne pourra naître en additionnant les logos.
Ce week-end, lors du Festival des idées organisé par le socialiste Christian Paul et le journaliste Guillaume Duval, la grande majorité des participants dessinaient à peu près le même futur : une grande plateforme pour construire un programme écologique et social afin de se rassembler derrière une même tête à la présidentielle. Tout le monde semble d'accord sur la stratégie. Mais beaucoup, à gauche, regrettent que les écolos refusent d'ouvrir en grand les portes pour les municipales. Un élu socialiste s'interroge : «Une liste écolo au premier tour, c'est bien mais pourquoi les opposer aux autres candidats de gauche et écolo ? Il ne faut pas oublier que nous dirigeons des centaines de communes et villes ensemble…»
Mais devant l'incinérateur, l'heure est à la photo de groupe sous le soleil. La petite bande qui voit l'avenir en vert se regroupe autour de Jadot et Batho, et prend son air le plus sérieux. On tente une petite blague : «C'est le gouvernement de 2022 ?» Delphine Batho répond du tac au tac : «Pourquoi vous rigolez, vous n'y croyez pas ?»