Tout le monde a un jour entendu parler des algues vertes. A la télé, à la radio, dans les journaux, par le bouche-à-oreille et souvent en vacances, sur les plages de Bretagne. C’est là qu’on les voit, qu’on sent leur odeur putride. Là où la mer les dégueule depuis 1971, date officielle de la première marée verte. Là encore où au moins trois hommes et quarante animaux sont morts depuis la fin des années 80. Un phénomène, pis, un scandale sanitaire et environnemental que beaucoup veulent taire. Pour comprendre, la journaliste Inès Léraud et l’illustrateur Pierre Van Hove lui consacrent une bande dessinée-enquête parue le 12 juin dernier.
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Tout ce qu’on peut y lire est vrai. Les témoignages, les documents scientifiques, les coupures de presse, les lettres, les mails… avec parfois, dans les bulles, une pointe d’ironie. Sans tout dévoiler, on est abasourdi par la disparition des échantillons dans les laboratoires, les corps enterrés avant d’être autopsiés, les mensonges des autorités, la mise à l’écart d’experts, les pressions exercées par les lobbies de l’agro-industrie, le silence pesant des agences sanitaires, la défaillance de la justice, la lutte inlassable des lanceurs d’alerte… Encore et encore.
Priorité au tourisme, à l’emploi et aux profits
«Les algues maudites sont le symptôme d'un mal profond», peut-on lire en quatrième de couverture. Un mal qui prend sa source dans l'ère industrielle post-Seconde Guerre mondiale. Celle de la production de masse, de la politique du chiffre et des pesticides à outrance. La machine est lancée, les agriculteurs embrigadés dans un système bien huilé prêt à tout pour préserver le tourisme, les emplois et les profits.
Beaucoup d’infos, beaucoup de protagonistes à digérer. Parfois, on se surprend même à revenir en arrière pour vérifier le nom de l’un ou de l’autre, en se disant même qu’il a un peu changé de tête. Malgré tout, passionnant. Le spectre, lui, n’est jamais loin. Pour la énième fois, la mairie d’Hillion dans les Côtes-d’Armor, a interdit le 22 juin dernier pour une durée indéterminée l’accès à l’une de ses plages en raison d’échouages d’algues vertes…