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Municipales

A Bordeaux, friture sur la ligne entre LREM et le Modem

L'investiture du macroniste Thomas Cazenave fait grincer des dents au parti de François Bayrou, allié avec le maire sortant et héritier d'alain Juppé.
Thomas Cazenave, alors directeur de cabinet du secrétaire d'Etat à l'Industrie, en septembre 2016. (JACQUES DEMARTHON/AFP)
par Eva Fonteneau, correspondante à Bordeaux
publié le 11 juillet 2019 à 6h43

La bataille des municipales s’annonce épique à Bordeaux. La semaine dernière, La République en marche (LREM) a propulsé dans la course Thomas Cazenave, actuel délégué interministériel à la transformation de l’Etat et proche d’Emmanuel Macron, pour tenter de rafler la capitale girondine. Un choix qui crée une situation cocasse : le candidat nouvellement investi affrontera en effet en mars 2020 le maire Les Républicains (LR) sortant, Nicolas Florian, héritier d’Alain Juppé (parti au Conseil constitutionnel) soutenu par… le Modem de François Bayrou.

«Une différence d’appréciation»

Avec Thomas Cazenave en tête de proue LREM, Bordeaux crée ainsi une première bisbille avec le Modem, brouillant la ligne entre les deux partis alliés de la majorité présidentielle. Piqué au vif par cette intronisation de LREM qui ne cache pas son ambition de briguer ce fief modéré, François Bayrou n'a pas tardé à réagir dans les coulisses et cette semaine sur Twitter. Le maire de Pau pointe notamment «une différence d'appréciation» et estime que «cette élection ne doit pas être totalement politisée». Il poursuit dans un autre tweet : «La majorité a dit se reconnaître dans l'équipe en place sous l'autorité d'Alain Juppé. Avancer avec l'aide d'un accord serait plus profitable pour tout le monde.» Rappelons que si Nicolas Florian est encarté LR, il aime à rappeler combien «[son] parti, c'est Bordeaux». Le dauphin de Juppé avait par ailleurs rapidement consolidé localement l'accord avec le Modem en prenant Fabien Robert, président girondin du Mouvement démocrate, comme premier adjoint.

Dans ce marathon, la lutte à Bordeaux s'avère d'autant plus houleuse que le pari Cazenave est risqué face à une équipe municipale soudée. En manque de notoriété, ce haut fonctionnaire qui n'a jusqu'alors effectué aucun mandat local, s'est vu crédité de seulement 8% des intentions de vote dans un sondage commandé à l'Ifop par l'association juppéiste Esprit Bordeaux, en mai. Nicolas Florian y caracole quant à lui en tête avec 45%. Loin d'être déstabilisé, Thomas Cazenave, dont la famille paternelle est originaire de Bordeaux, est au contraire bien déterminé à faire mentir les chiffres et à «aller jusqu'au bout». Le quadragénaire l'a martelé lors de son investiture : «Parce que c'est Bordeaux, parce que c'est ancré dans mon histoire, parce que c'est la poursuite de mon engagement politique […], je conduirai ce projet jusqu'au bout.»

L’écologie comme premier opposant

Dans le même temps, un autre candidat à gauche se démarque au milieu de la mêlée. L’écologiste Pierre Hurmic a recueilli 14% des intentions de votes, ce qui le hisse de fait comme premier opposant à Nicolas Florian, grand favori. S’il n’a pas encore été officiellement désigné, l’élu local EE-LV a déjà appelé à un rassemblement des sensibilités de gauche. Un appel du pied qui n’a pas laissé indifférent les socialistes et les communistes, qui ouvrent la porte des négociations dans la perspective optimiste d’une alternance. Depuis 1947, la ville de Bordeaux n’a connu que deux maires avant l’arrivée de Nicolas Florian en 2019 : Jacques Chaban-Delmas puis Alain Juppé, si l’on excepte l’intérim d’Hugues Martin entre 2004 et 2006.