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Nominations à la Culture : malgré la fronde, Boutonnat au CNC

En dépit d’une situation inédite de fronde de la part de nombreux professionnels du cinéma, le gouvernement passe outre les craintes du secteur et impose son candidat.
Dominique Boutonnat en 2007. (Photo Getty images)
publié le 24 juillet 2019 à 21h36

Alors que les postes laissés vacants ou en intérim alimentaient depuis des semaines rumeurs et conjectures sur les candidats qui auraient finalement l'agrément de l'Elysée, Emmanuel Macron a choisi le jour anniversaire des 60 ans du ministère de la Culture pour une salve d'annonces avec pas moins de 17 nominations. Eric Ruf est renouvelé à la tête de la Comédie-Française, de même que Catherine Pégard au château de Versailles. Au terme d'un feuilleton complexe, c'est finalement l'Allemand Alexander Neef (jusqu'ici directeur de l'opéra de Toronto) qui prendra la succession de Stéphane Lissner à l'Opéra de Paris en 2021. Le Palais de Tokyo sera désormais piloté par Emma Lavigne, actuelle directrice du Centre Pompidou-Metz et figure ultra-respectée dans le monde de l'art contemporain. A Rome, la villa Medicis reste, elle, sans direction.

En dépit d'une situation inédite de fronde de la part de nombreux professionnels du cinéma vis-à-vis de l'arrivée de Dominique Boutonnat à la tête du Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC), le gouvernement passe outre les craintes du secteur et impose son candidat. Le communiqué de presse du CNC brosse d'ailleurs une biographie avantageuse de son nouveau président. Dominique Boutonnat y est notamment présenté comme ayant contribué à la création et au développement de «250 projets cinématographiques et audiovisuels particulièrement divers», dont une trentaine de films qui recouvrent un large spectre de la création, du cinéma d'auteur (comme le Passé d'Asghar Farhadi ou Polisse de Maïwenn) au plus populaire (l'Arnacœur de Pascal Chaumeil, Intouchables d'Eric Toledano et Olivier Nakache…).

Raport controversé sur le financement privé du cinéma

Il se trouve que plusieurs de ces films ont été réalisés par des signataires de la pétition qui s'opposait à sa nomination, laquelle compte actuellement plus de 6 800 personnes, dont Catherine Corsini, Laurent Cantet, Nicole Garcia, Pierre Salvadori, Katell Quillévéré ou encore Christophe Honoré. C'est en tant que que cofondateur et président de Ciné Axe, société de financement de type Sofica, qu'il a pu entrer dans les architectures de financement à multiguichets de ces films, mais son palmarès en tant que producteur reste nettement plus modeste - avec notamment Money de Géla Babluani en 2017.

Dominique Boutonnat est aussi l'auteur d'un rapport très controversé sur le financement privé du cinéma, publié en mai. Ses préconisations vont dans le sens d'un «accroissement de la rentabilité» des films et se veulent une réponse aux mutations qui affectent le secteur et fragilisent la pérennité de ses ressources, notamment face aux géants de l'audiovisuel mondialisé (les habituels Netflix, Amazon et bientôt Disney).

Dans son communiqué, le Syndicat des producteurs indépendants (SPI) se dit «attentif à ce que les réformes qui sont sur le point de s'engager ne remettent pas en cause la spécificité des financements de la production française». La Société des réalisateurs de films déclare quant à elle ne pas revenir «sur les divergences d'analyse exprimées aux côtés d'une très grande partie de la filière indépendante sur le rapport de M. Boutonnat», et attendre de connaître la feuille de route du nouveau président.