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Libération
Récit

Aubert et Larrivé : les quadras veulent la tête de LR

Pas échaudés par la claque des élections européennes, les deux députés sont candidats à la présidence du parti Les Républicains face au favori Christian Jacob.
Guillaume Larrivé, à la bibliothèque de l'Assemblée nationale le 12 novembre 2018. (Photo Roberto Frankenberg. Albert Facelly)
publié le 4 août 2019 à 19h46

Même génération et même profil de techno passé par les cabinets ministériels. Julien Aubert, 41 ans, député du Vaucluse, qui a usé ses fonds de culotte sur les bancs des amphis de l’ENA en même temps que l’actuel locataire de l’Elysée, et Guillaume Larrivé, 42 ans, député de l’Yonne, énarque lui aussi, disputent tous deux la présidence du parti Les Républicains au candidat «naturel», Christian Jacob, patron du groupe LR à l’Assemblée nationale.

Ces deux «jeunes turcs» de la droite sont arrivés à l’âge où l’on espère voir enfin se réaliser ses ambitions les plus hautes. Mais les voilà relégués dans l’opposition pour avoir choisi un camp qui, depuis 2012, enquille défaite sur défaite. Quand leurs camarades de promotion arpentent par bataillons les coulisses du pouvoir, Aubert et Larrivé se retrouvent en position de challengeurs pour prendre la direction de LR. Le parti de la droite de gouvernement qui a péniblement obtenu 8% des suffrages aux dernières élections européennes. Deux volontaires pour prendre la barre d’un navire en perdition à l’issue du scrutin interne organisé par LR en octobre.

Ump bis

Julien Aubert, le sudiste, séguiniste revendiqué, se tient plutôt dans la vieille tendance bonapartiste de la droite. Du genre : le chef fixe la ligne et le suivent ou reviennent au bercail ceux qui l'approuvent. «Christian Jacob pense exactement l'inverse. Parce que nous sommes affaiblis, il est dans une logique de temporisation. Lui plaide pour la continuité alors que moi je suis pour la rupture», explique le député élu pour la première fois en 2012, qui entend «mettre les questions qui fâchent sur la table» : «Nous avons trop calé le rythme de nos changements internes sur le calendrier de la présidentielle», tacle-t-il.

Là où ce dernier serait prêt à charger à la hussarde, Guillaume Larrivé, ancien du Conseil d'Etat et fils d'un colonel d'artillerie, préfère manier le concept plutôt que le sabre. Son ambition est de construire «le mouvement de l'après-Macron» : «La question, ce n'est pas la survie ou l'existence de la droite, mais c'est celle de la France, expose-t-il. Les Français regardent LR comme un parti d'hier et le mettent dans le même sac que le PS. Or ce qui menace LR, c'est de se cantonner à être un petit parti de protestation, un club de nostalgiques ou une association d'anciens combattants.» Manière courtoise de dire que c'est ce qui risque d'arriver avec Christian Jacob aux manettes du parti de la rue de Vaugirard…

Photo Roberto Frankenberg. Albert Facelly

Alors que Guillaume Larrivé entend, lui, «construire un mouvement de gouvernement, mouvement populaire capable de gouverner la France». «Je ne veux pas être un animateur de groupe parlementaire qui réagit à l'actualité», promet-il. Selon lui, LR doit donc mettre à profit «les deux ans qui viennent pour construire son projet». Un projet qu'il place sous le signe de «la réconciliation» alors qu'Emmanuel Macron «aggrave les tensions françaises».

Pas question non plus pour Julien Aubert de refaire une UMP bis : «Jacob y croit encore. Mais c'est terminé, les centristes sont déjà partis chez Macron.» Les concurrents de Christian Jacob ont au moins deux choses en commun, leur volonté de «redresser le parti» et de «mettre fin aux primaires ouvertes» - «véritables bombes à fragmentation», selon l'expression de Guillaume Larrivé. Le député bourguignon, s'il est élu, convoquerait un congrès pour faire adopter de nouveaux statuts pour le parti. Julien Aubert voudrait pour sa part organiser quatre conventions : sur l'Europe, la décentralisation, les questions sociétales et l'économie. Histoire que LR fasse son aggiornamento sur ces sujets et se dote enfin d'une ligne claire.

En se rasant

Jean Leonetti, l’actuel président par intérim de LR, a imposé que le prochain responsable du parti ne soit pas candidat à la présidentielle. Julien Aubert et Guillaume Larrivé jurent la main sur le cœur qu’ils n’y pensent pas. Même en se rasant le matin. «Ils regardent passer les trains quand d’autres de leur génération sont déjà ministres. A moins qu’ils ne pensent à 2027», résume un de leur collègue député, qui s’interroge sur la finalité de cette stratégie.