Le vert doit remplacer le rouge et le rose. Au nom de ce mot d’ordre chromatique, que le bon score d’Europe Ecologie-les Verts aux européennes a conforté, Yannick Jadot jette à la poubelle l’ancien vocable de «gauche». C’est désormais la défense de la planète, pense-t-il, qui sera l’alpha et l’oméga dans cette partie de l’échiquier politique, quitte à caresser l’hypothèse d’un élargissement à une droite civilisée. Pour être franc, il y a dans cet aggiornamento une grande part de posture. Tout ou presque dans le programme des Verts, dans les prises de position de leurs leaders, les rattache à la tradition de la gauche : politique sociale, intervention publique, militantisme alternatif, ouverture aux migrants, Europe sociale et écologique, libertés publiques, réformes sociétales. Au demeurant, on ne voit pas très bien comment la transition nécessaire vers une économie non carbonée pourrait convaincre l’électorat - les classes populaires au premier chef - sans une redistribution massive, de larges investissements publics, une attention particulière aux plus fragiles, toutes idées qui font partie du patrimoine historique de la gauche. Quant à la querelle du «productivisme», elle tend à s’atténuer, tant les autres formations progressistes protestent désormais de leurs convictions écologiques. Jadot change l’étiquette : le flacon est le même. Et quelle que soit la rhétorique employée, il n’y a pas de victoire possible sans union des composantes progressistes, avec ou sans discussions d’appareil. Reste aux autres courants à imposer le rapprochement. Non en se diluant dans un vaste «parti de la planète», mais en démontrant leur identité et leur pertinence. Plutôt qu’une négociation improbable avec des Verts qui aspirent à l’hégémonie, c’est l’urgence de l’heure, faute de quoi ces courants disparaîtront. Avant de s’unir avec les autres, il faut savoir qui l’on est. L’union viendra de surcroît.
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