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Alexis Kohler : la plainte pour prise illégale d’intérêts classée sans suite

publié le 22 août 2019 à 21h06

Emmanuel Macron peut souffler. Le Parquet national financier (PNF) vient de classer sans suite l'enquête pour «prise illégale d'intérêts» visant le secrétaire général de l'Elysée et proche collaborateur du chef de l'Etat, Alexis Kohler. «L'analyse des éléments recueillis par la brigade de répression de la délinquance économique (BRDE) de la direction générale de la police judiciaire ne permet pas de caractériser les infractions initialement suspectées», conclut, sans plus de détails, le communiqué du PNF publié jeudi.

En juin 2018, le parquet avait ouvert une enquête préliminaire sur l'éminence grise de l'Elysée, un haut fonctionnaire réputé très discret, après une série d'articles de Mediapart. Selon le site d'information, l'énarque aurait «omis» de déclarer ses liens avec la famille de l'armateur MSC au moment de prendre la direction financière de la filiale «croisière» du groupe en 2016, et d'abandonner, temporairement, les bons et loyaux services de l'Etat.

Sauf qu'on ne quitte pas le navire de la fonction publique sans avoir déclaré, au préalable, ses intérêts à la commission de déontologie, l'instance chargée de valider le départ des fonctionnaires vers le privé - ce qu'aurait oublié de faire le haut fonctionnaire. Un «mensonge d'Etat», titre alors Mediapart, qui rappelle qu'entre 2010 et 2012, Alexis Kohler avait occupé le poste de représentant de l'Etat auprès du conseil d'administration des chantiers navals de Saint-Nazaire (rebaptisés depuis «STX France»), qui comptent MSC parmi ses gros clients. Comprendre : Alexis Kohler aurait pu participer aux discussions sur l'avenir de STX avant de rejoindre MSC, puis de revenir en grâce au gouvernement après l'élection d'Emmanuel Macron.

Les accusations de conflit d’intérêts sont d’autant plus compromettantes qu’à l’époque, STX est convoité par un concurrent direct de l’armateur MSC, l’italien Fincantieri. Certes, la fusion avec Fincantieri n’a finalement pas eu lieu. Mais les soupçons pèsent désormais sur le rôle exact joué par le haut fonctionnaire dans les négociations : Alexis Kohler est-il intervenu pour défendre MSC ? Et depuis combien de temps songeait-il à rejoindre le groupe dirigé par les cousins de sa mère, Rafaela et Gianluigi Aponte, cofondateurs et actionnaires de l’armateur ?

Pour l'association Anticor, Alexis Kohler a «profité, à chaque étape, de ses différents postes pour défendre les intérêts de sa société familiale». Un motif suffisant pour justifier le dépôt de deux plaintes, en juin et en août 2018, puis d'une troisième en mars 2019, pour «omission substantielle de ses intérêts» et «faux et usage de faux».

Sitôt connu le classement sans suite de l'enquête du PNF, l'association de lutte contre la corruption a annoncé son intention de déposer une nouvelle plainte avec constitution de partie civile, «afin que la lumière soit enfin faite sur cette affaire».