Le tribunal administratif de Rennes a suspendu mardi l’arrêté du maire de Langouët (Ille-et-Vilaine), Daniel Cueff, qui prévoyait l’interdiction des produits phytosanitaires à moins de 150 mètres des habitations. Dénonçant un double discours au sommet de l’Etat, l’édile a annoncé qu’il allait faire appel du jugement.
Quelle a été votre réaction en apprenant la décision du tribunal ?
De la colère d’abord. Dans ses attendus, le tribunal ne prend pas une seule fois en compte la nécessité de protéger les populations des produits phytosanitaires en lieu et place d’un Etat défaillant qui ignore les directives européennes à ce propos depuis 2009.
Il n’y a aucune analyse. Ce jugement redit simplement ce qu’a avancé la préfecture sur la réglementation des épandages de pesticides, à savoir qu’elle serait un domaine réservé du ministre de l’Agriculture. Les juges n’ont pas cherché à savoir si le maire pouvait être compétent pour protéger ses habitants, notamment à travers son pouvoir de police municipal, qui établit qu’il doit assurer le bon ordre, la sûreté et la salubrité publique dans sa commune et prévoit l’interdiction d’exhalaisons nuisibles. C’est un jugement de pure forme et il faudra encore quatre ou cinq mois pour connaître l’avis du tribunal sur le fond.
Sur le plan juridique, pouvait-il en être autrement ?
Bien sûr ! C’est la préfète d’Ille-et-Vilaine qui a estimé que mon arrêté était entaché d’irrégularités et qui a demandé sa suspension immédiate. Elle aurait pu engager un simple recours sur le fond, ce qui nous aurait permis d’expérimenter pendant au moins quatre ou cinq mois cet arrêté dans un climat de paix civile et sociale. Nous aurions pu jouer les intercesseurs entre les habitants qui demandent plus de protection et les agriculteurs pour faire évoluer leurs pratiques sur cette zone de 150 mètres sans pesticides que prévoyait l’arrêté. Cette bande n’en restait pas moins cultivable et on aurait pu travailler sur un projet intercommunal et expérimenter de nouvelles techniques, comme le mélange des bonnes et des mauvaises graines récoltées dans un champ de blé et passées dans une trieuse.
Le Président a reconnu vendredi la légitimité de vos «intentions» et la ministre de l’Ecologie a quant à elle annoncé une consultation…
On est dans un paradoxe extraordinaire. D’un côté, on me donne raison en annonçant qu’on va mettre très prochainement en place une nouvelle législation, ce qui laisse penser que mon arrêté a un bel avenir. Et de l’autre, il est attaqué et retoqué devant un tribunal. Ce doit être la politique du «en même temps» !