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Libération
RENTRÉE

A droite, tout le monde s’éclate

Après l’échec des européennes, le parti Les Républicains va tenter d’afficher un semblant d’unité ce week-end à La Baule. De fait, à un mois et demi de l’élection du nouveau président du mouvement, la plupart des têtes d’affiche misent sur leurs propres boutiques et leurs propres raouts.
Valérie Pécresse et Gérard Larcher à Paris le 4 juin, après la démission de Laurent Wauquiez. (Photo Albert Facelly pour Libération)
publié le 30 août 2019 à 18h56

La Baule, ville inscrite au patrimoine de la droite française. En 2005, la chic station balnéaire de Loire-Atlantique avait été le témoin de la mise en scène de la rivalité entre Dominique de Villepin et Nicolas Sarkozy. En 2012, l’UMP y avait tenu son université d’été. Depuis cette date, faute de moyens financiers, LR avait abandonné ce rendez-vous traditionnel, mais sans pour autant renoncer à La Baule. L’université de rentrée organisée par la fédération de Loire-Atlantique et qui, au départ, n’avait qu’une ambition régionale, est devenue sous la houlette de Franck Louvrier, ex-communiquant de Nicolas Sarkozy et candidat à la mairie de cette ville, le point de rencontre pour une famille disloquée et qui rêve de se recomposer.

Ce samedi, pour la première fois, les trois candidats à la présidence de LR, Christian Jacob, président du groupe à l'Assemblée, et ses deux concurrents, les députés Guillaume Larrivé et Julien Aubert (lire ci-contre), se retrouveront à la même tribune pour le premier débat de cette campagne avant le vote, les 12 et 13 octobre (19 et 20 octobre en cas de second tour). Jean Leonetti, président par intérim du parti, Gérard Larcher, président du Sénat, et Bruno Retailleau, ancien président de la région et patron des sénateurs Les Républicains, participeront à ces retrouvailles. Avec une photo de famille presque complète. Sans oublier les centristes.

Fracas

Gérard Larcher sera aussi présent le lendemain, avec François Baroin et Dominique Bussereau, à la traditionnelle fête de la pomme organisée par le président de la région Normandie, Hervé Morin, à Epreville-en-Lieuvin (Eure). Le président de la Haute Assemblée avait lancé dès le lendemain de la cinglante défaite de LR aux européennes des «ateliers de la reconstruction» pour «reconstruire un projet qui rassemble la droite et le centre et qui sera l'émanation de la diversité et de la richesse de nos territoires, de nos élus et de nos mouvements politiques», déclarait-il alors. Précisant que «ce rassemblement devra donner leur juste place aux diverses sensibilités qui ont toujours prévalu, aux alliances qui ont cimenté nos majorités et sans lesquelles aucune victoire n'aurait été possible». Sa présence aux côtés du centriste Morin en est l'illustration.

Mais dans les faits, LR fait une rentrée en ordre dispersé. Lors du lancement de sa campagne, le 27 août à Villeneuve-Loubet (Alpes-Maritimes), Christian Jacob, qui se veut précisément «le candidat du rassemblement», a mis en garde contre la tentation «de créer 10, 15, 20, 30 chapelles» : «Si notre ambition, c'est de construire une grande cathédrale qui soit la véritable force d'alternance après le macronisme, si on a vraiment envie de travailler ensemble, c'est dans la famille, la grande maison que nous devons le faire», a-t-il prévenu.

Un avertissement qui semble loin d'avoir été entendu. Car c'est ce samedi aussi, à 500 km de La Baule, à Brive-la-Gaillarde, que la présidente de la région Ile-de-France, Valérie Pécresse, qui a quitté LR avec fracas au lendemain de la défaite aux européennes, réunit les troupes de son mouvement «Libres !». De son côté, l'ex-président de LR, Laurent Wauquiez, patron de la région Auvergne-Rhône-Alpes, entreprendra sa traditionnelle ascension du mont Mézenc. Et le week-end suivant, les Jeunes Républicains tiendront leur campus au Touquet, la ville de Daniel Fasquelle, le trésorier du parti. Avec là encore la participation des trois prétendants à la présidence du parti. Le 8 septembre également, Bruno Retailleau rassemblera les militants de Force républicaine, l'ancien parti de François Fillon. Julien Aubert, lui, lancera sa campagne à Lourmarin, sur ses terres du Vaucluse. Pour compléter le tableau, le 22 septembre, Guillaume Peltier, patron du courant «la Droite forte», tiendra sa fête de la Violette en Sologne. Enfin, Geoffroy Didier, secrétaire général délégué de LR, qui ne veut pas être en reste, devait également ouvrir sa petite boutique en octobre «pour faire émerger une droite moderne» au sein du parti. Une manière de se démarquer de la ligne conservatrice incarnée par l'ancien chef de file LR aux européennes, François-Xavier Bellamy, qui a réuni à peine plus de 8 % des suffrages.

«L’année moins 2»

«Que voulez-vous ? ironise un des cadres du parti. C'est le moment où tout le monde a envie d'exister avec son petit mouvement pour tenter de peser à l'avenir auprès du futur président du parti. Chacun place ses pions sur l'échiquier.» Gilles Platret, maire de Chalon-sur Saône et porte-parole de LR, concède que tout cela «peut apparaître comme brouillon mais c'est une étape nécessaire. Nous sommes encore en reconstruction». «Nous en étions à l'année zéro de la droite en 2017 après le désastre de la présidentielle, nous sommes paradoxalement à l'année moins 2, c'est-à-dire qu'on a encore réussi à reculer», ironisait vendredi Jean-François Copé, soutien de Jacob, «seul à même de faire revenir tout le monde à la table». Visiblement, ce n'est pas gagné. A reconstruire chacun dans son coin, la maison LR risque d'être encore un peu plus branlante.