Il est des timbres de voix qui marquent une époque. Les aigus incontrôlés de Thierry Roland convoqueront pour toujours les glorieuses soirées de foot. La gouaille paternelle de Chirac réveille les vœux d’un président que les Français adoraient détester. Demeurera aussi cet accent pyrénéen, celui des soirs de peur, des augures funestes, quand Paris découvrait que la mort pouvait à nouveau s’inviter sous ses fenêtres. Immuable aussi, ce regard bleu inquiet, que l’on s’efforçait de sonder, pour savoir si l’heure était arrivée de changer nos habitudes, d’abandonner les terrasses devenues trop chétives, pour se ranger derrière des murs de béton, plus enclin à filtrer les balles.
C'était il y a quatre ans, hier et une éternité à la fois, mais jusqu'à la fin de nos vies, François Molins sera là. De ce radeau morbide, «le PG» comme le nomment ses équipes - «PG» pour procureur général - s'est extrait sans regrets éternels. Le savoureux hasard du calendrier fait que notre entrevue se tient le 1er juillet, jour symbolique de la création du rutilant parquet national antiterroriste (Pnat - qu'il faudrait appeler Pnatch parce qu'il traite aussi les crimes contre l'humanité). Le microcosme parisien a beaucoup jasé sur ses velléités d'en être. Mais Molins, qui reconnaît «le caractère addictif» du terrorisme, a coupé le cordon.
On pourrait ne pas le croire, mais le montagnard, réputé pudique, pour ne pas dire rétif à la communication, est trop radieux (le mot est juste) pour que ce soit