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Libération
Témoignage

Raphaëlle Rémy-Leleu, porte-parole d’Osez le Féminisme «Il faut mettre de l’argent sur la table»

publié le 2 septembre 2019 à 20h06

«Un Grenelle, pourquoi pas, même s’il me semble que le mot est impropre et renvoie plutôt, historiquement, à de véritables espaces de négociations qui ont abouti à des avancées concrètes, sur l’environnement, ou encore les congés payés… Je ne suis pas certaine que les conditions dans lesquelles se tient ce Grenelle permettent d’avancer autant. Je crains qu’il s’agisse simplement d’écouter les informations martelées depuis des années par les associations. C’est très bien, mais il est temps de mener des actions. Nous militons pour l’inscription du terme "féminicide" dans le code pénal afin d’acter politiquement, juridiquement et dans la société, qu’il s’agit de crimes de haine machiste.

«Il faut mettre de l’argent sur la table. A titre d’exemple, l’Espagne, qui compte 46 millions d’habitants, a débloqué 1 milliard d’euros sur cinq ans spécifiquement dédiés aux violences faites aux femmes. Ces moyens financiers pourraient servir à ouvrir davantage de structures multidisciplinaires, dans lesquelles sont dispensés des soins physiques, psychologiques, de l’accompagnement juridique, notamment pour ce qui touche au recueil de preuves. La France en compte une petite poignée, notamment à Bordeaux ou à Tours. Mais là encore, si on jette un œil sur nos voisins, la Belgique, qui est un pays beaucoup plus petit et moins peuplé, compte neuf structures de ce type.

«Quand Marlène Schiappa fixe l’objectif de 100 % d’appels traités par le 3919, c’est très bien, mais je crois qu’il est temps de s’interroger sur la philosophie générale de nos politiques : souhaite-t-on déployer des structures étatiques ? Ou continuer de se reposer sur les associations ? Certes elles sont expertes depuis des années, mais encore faut-il leur en donner les moyens, et négocier des conventions budgétaires triennales avec elles, ne pas laisser de toutes petites structures courir chaque année après les financements. Je m’interroge sur le timing : le Grenelle va se tenir de septembre à novembre, mais les budgets de l’Etat seront déjà bouclés à Bercy…»