Deux compagnies aériennes françaises à la barre du tribunal de commerce le même jour pour essayer d'obtenir leur survie économique : la coïncidence qui frappe Aigle Azur et XL Airways est aussi troublante qu'affligeante. La France, qui assemble des Airbus à Toulouse et accueille près de 80 millions de touristes par an, dont bon nombre arrivent par l'aéroport de Roissy, n'aurait donc pas de marché pour quatre ou cinq compagnies aériennes aux côtés de l'incontournable groupe Air France-KLM ? Etonnant à plus d'un titre, lorsqu'on sait que le transport aérien progresse de 5 % par an. Si aucun candidat sérieux et solvable ne se présente pour reprendre ces compagnies, les premières victimes seront bien évidemment leurs 1 650 salariés, sans compter les sous-traitants de ces entreprises. Mais aussi les voyageurs, qu'ils se déplacent à titre personnel ou professionnel.
La règle économique est en effet immuable : moins il y a de compagnies sur des destinations données, plus les prix pourront augmenter. Certes, les zélotes de la libre concurrence objecteront que sur ce marché désormais mondial, des compagnies européennes low-cost s’empresseront de combler l’espace et surtout de récupérer les précieux créneaux horaires de décollage laissés vacants. A quel prix ? Ce que le passager pense gagner en s’acquittant d’un billet un peu moins cher génère d’autres coûts pour la collectivité. Les transporteurs à bas prix, à l’image de Ryanair, ont une fâcheuse tendance à faire subventionner par les collectivités locales les aéroports qu’ils choisissent de desservir. Le contribuable paie ce que le client pense économiser. En outre, les compagnies low-cost excellent dans l’art de décoller et d’atterrir en France avec des équipages dont les contrats de travail sont irlandais ou établis en Europe centrale. Le moins-disant social est donc garanti, tout comme la distorsion de concurrence avec les compagnies françaises qui, elles, ne s’affranchissent pas du modèle social en vigueur dans l’Hexagone. Au final, si XL Airways et Aigle Azur restent définitivement clouées sur le tarmac, c’est malheureusement une certaine idée du voyage qui sera durablement touchée.