Emission emblématique de Canal + et de son «esprit», les Guignols de l'info n'auraient probablement pas eu autant de succès sans leur personnage de Jacques Chirac. La marionnette est créée dès le lancement de l'émission, en 1988, et elle n'a cessé d'y être omniprésente, y compris après 2007, alors que celui s'était retiré de la vie publique. Décrit comme un (très) bon vivant, blagueur, verbe léger, amateur de foot, gentil truand et buveur de bière, Chirac collectionne les punchlines et les sketchs hilarants, comme ceux où il est grimé en «Super-Menteur» (époque de la campagne présidentielle de 2002, malheureusement introuvables en ligne) ou ses très nombreuses associations avec sa femme Bernadette, qu'il appelle «maman». En fait, Jacques Chirac incarne les Guignols, à égalité avec l'autre incontournable Patrick Poivre d'Arvor, qu'il appelle toujours d'un tonitruant «D'Arvor». Florilège (pas du tout exhaustif).
Chirac et Balladur
C'est le moment fondateur, celui où Chirac devient le roi des Guignols. La campagne présidentielle de 1995 voit la droite se déchirer entre Jacques Chirac et Edouard Balladur, alors Premier ministre. Longtemps, ce dernier part favori pour remporter l'élection, mais Chirac, donné pour mort en janvier, finit par être élu à l'Elysée en mai. Aux Guignols, Balladur est dépeint en aristocrate coincé, surnommé «couille molle» par un Chirac virevoltant («Mangez des pommes») - au point que l'on accusera l'émission d'avoir largement contribué au capital sympathie du Corrézien, accusation répétée en 2002. Grand classique de l'époque : Jacques Chirac et Philippe Seguin transformés en flingueurs de Pulp Fiction qui règlent leurs comptes aux pro-Balladur Nicolas Sarkozy, François Léotard et Gérard Longuet. Puis viennent l'élection et son entrée à l'Elysée. «Putain, deux ans», le slogan lancé en 1993 devient «putain, sept ans». Surtout, la marionnette savoure sa victoire sur Balladur : «J'ai niqué couille molle !»
Chirac et Sarkozy
A partir de 2002 et du deuxième mandat de Jacques Chirac, c'est la figure de Nicolas Sarkozy qui émerge comme principal «meilleur ennemi» de la marionnette star. Une relation en fait plus ancienne, puisque Sarkozy était présenté dès 1995 par les Guignols comme le bras droit de Balladur qui avait trahi Chirac. Déjà, à l'époque, des sketchs mettent en scène celui qui n'est que le maire de Neuilly cherchant à se rabibocher…
Les Guignols vont souvent jouer sur la filliation Balladur-Sarkozy, comme dans le célèbre sketch «Gangs of RPR», parodie du film Gangs of New York, où le premier veut venger le second, qu'il a vu tué par Chirac lorsqu'il était enfant.
«Petite couille nerveuse», «petite crotte», «le nabot»… Chirac président assiste impuissant à l'ascension de Sarkozy, mais sa marionnette ne se prive pas de l'affubler des surnoms les plus ridicules, comme lorsqu'il lui apporte son soutien pour la présidence de l'UMP en 2004.
Chirac président
Durant les douze années de présidence de Jacques Chirac, il ne se passe sans doute pas un jour sans qu'il n'apparaisse aux Guignols. Tout est prétexte à sortir sa marionnette, placée parfois dans des situations absurdes, comme lorsqu'il déconne au téléphone avec ses potes George W. Bush et Boris Eltsine à coups de «wazzzaaaaaa»…
Le côté démagogue-vendeur de tapis de Chirac est aussi régulièrement moqué, comme lorsqu'il se met à parler créole au retour d'un voyage aux Antilles et prétend qu'il s'agit de sa langue natale : «Jusqu'à l'âge de 15 ans, j'étais noir.»
Chirac et le lol
Avant Internet, le LOL existait déjà et la marionnette de Chirac aux Guignols en était l'un de ses meilleurs ambassadeurs. En 2001, la chanson Gomez et Tavarès (avec notamment Dadoo), qui parle de deux flics ripoux, cartonne à la radio. Les Guignols la parodient en «Chirac et Bernadette», mouillés jusqu'au cou dans les affaires mais jamais inquiétés. Parfait.
D’ailleurs, pour symboliser son habileté à échapper aux différentes affaires qui l’entourent, les auteurs de l’émission vont jusqu’à inventer un jeu : le «chat-bite», qui devient «chat-minou» avec Elisabeth Guigou.
Enfin, le Chirac de latex a aussi ses marottes, notamment la technologie, les auteurs reprenant à de nombreuses reprises la bourde du Président qui transforma la souris d’ordinateur en «mulot».