La lune de miel serait-elle terminée entre Geoffroy Roux de Bezieux et Emmanuel Macron ? Prompts à applaudir la politique économique du gouvernement quand elle était faite de baisse de «charges» et de suppression de l'ISF, les patrons (petits et grands) n'apprécient pas du tout certaines orientations du projet de loi de finances pour 2020 adopté ce vendredi en Conseil des ministres. Dans un rude communiqué, le Medef «regrette les choix budgétaires du gouvernement qui renonce à réduire sa dépense publique, son endettement, et à soutenir la compétitivité et l'emploi». Pour l'organisation patronale, qui réservait jusque-là des ovations aux ministres lors de ses universités d'été, ce prochain budget «ne contient pas les mesures susceptibles de renforcer la compétitivité des entreprises, de favoriser l'investissement, moteur de la croissance au premier semestre 2019, et de soutenir les créations d'emplois». Rien que ça… Le Medef y voit carrément l'«arrêt de la politique de l'offre».
Petit rappel tout de même : en 2019, les entreprises ont profité à la fois du crédit d'impôt compétitivité emploi (CICE) au titre de 2018 et de sa transformation en baisses pérennes de cotisations patronales. Soit tout de même 20 milliards d'euros pour «soutenir» leur compétitivité. Par ailleurs, dans ce budget 2020, le gouvernement assume sa promesse d'une baisse de l'impôt sur les sociétés (IS). Pour celles ayant un chiffre d'affaires inférieur à 250 millions d'euros, le taux sera désormais de 28%. Pour les plus grandes, le taux sera de 31% sur les bénéfices au-delà de 500 000 euros. L'exécutif maintient son engagement d'un taux d'IS à 25% pour toutes entreprises en 2022. Au total, les entreprises bénéficieront ainsi l'an prochain d'une baisse d'impôt estimée par Bercy à 1 milliard d'euros. «Les impôts baisseront de 13 milliards d'euros pour nos entreprises sur la durée du quinquennat», a souligné le ministre de l'Economie et des Finances, Bruno Le Maire, en commission des finances de l'Assemblée, ce vendredi.
«Le Medef a la mémoire courte»
Mais pour le Medef, ce budget 2020 «risque de faire caler le moteur de la croissance». Même son de cloche du côté de la CPME (Confédération des petites et moyennes entreprises) qui s'inquiète d'«un certain nombre de mesures qui vont renchérir les prélèvements sur les entreprises» : fin programmée des exonérations de taxe sur les carburants sur le gazole non routier (GNR), taxe sur le transport aérien, nouveau barème pour le malus automobile, crédit d'impôt transition énergétique (Cité) «redéployé à la baisse»… «Autant de mesures qui fragiliseront des pans entiers de notre économie», conclut l'organisation représentante des PME.
Dans la même veine, le président LR de la commission des finances, Eric Woerth, a interpellé son ex-camarade de gouvernement : «Vous basculez, assez brutalement d'une politique de l'offre […] à une politique de la demande, a attaqué l'ancien ministre du Budget. Il faut croire dans la compétitivité de nos entreprises qui, elles seules, distribuent du pouvoir d'achat.» Ces «critiques sont sans fondements», a répondu Le Maire, en citant directement le Medef. Avant de se justifier : «Pourquoi avons-nous choisi de baisser l'impôt sur les sociétés pour toutes les entreprises, y compris pour les plus grandes ? a-t-il faussement interrogé. Nous avons fait le choix courageux de ne pas toucher au crédit impôt recherche.»
Le ministre de l'Economie et des Finances a également listé «ce qui a été décidé dans [la loi] Pacte» : modification des seuils, calculs fiscaux, développement de l'intéressement, de la participation… «Le Medef a la mémoire courte, a critiqué Le Maire. Ce gouvernement a développé depuis deux ans et continuera à développer une politique de l'offre.» Manière de dire que décidément, le patronat se comporte comme un enfant gâté.
🔹Sans oublier la loi #PACTE qui supprime les seuils qui bloquaient le développement de nos entreprises, 🔹sans oublier sa réforme du financement pour mobiliser les fonds propres,
— Olivia Gregoire (@oliviagregoire) September 27, 2019
Mais le @medef critique encore et encore ce qui peut s’appeler une politique pro-entreprise ! https://t.co/YwAEytMYrF