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Élections

Municipales à Marseille : l'union de la gauche fond sous le soleil écolo

Marseille, une élection à la loupedossier
Les militants locaux d’Europe Ecologie-les Verts s’apprêtent à voter une motion actant une liste en solo lors des prochaines municipales. Une stratégie à rebours de l’initiative d’union des gauches marseillaises qui était pourtant en bonne voie.
L'écologiste Sébastien Barles le 25 janvier 2014 à Marseille, après le vote interne sur l'accord entre leur parti et le PS pour les précédentes municipales. (Patrick GHERDOUSSI/Photo Patrick Gherdoussi pour Libération)
par Stéphanie Harounyan, correspondante à Marseille
publié le 4 octobre 2019 à 15h11

Partir en Vert et contre tous ou faire front commun, à gauche, dès le premier tour ? Les militants marseillais d'Europe Ecologie-les Verts doivent se prononcer samedi sur leur stratégie municipale. Deux possibilités : l'autonomie ou le ralliement au «Mouvement sans précédent» lancé fin juillet dans Libération, qui réunit des citoyens et des élus locaux – issus du PS, de LFI et du PCF – pour s'opposer aux héritiers du maire LR, Jean-Claude Gaudin. Aux dernières nouvelles, c'est plutôt vers le scénario d'une liste «écolo-citoyenne» indépendante que les militants marseillais semblent pencher.

C'est en tout cas l'option que vont défendre sept des huit référents locaux d'EE-LV en soumettant au vote une motion pour une liste réunissant des «formations se réclamant de l'écologie» associées à des «experts-citoyens». Et en reportant la question des alliances avec les partenaires de gauche au second tour. Candidat à la tête de liste, Sébastien Barles défend ce solo écolo, alors qu'il faisait pourtant partie du casting qui discutait d'une potentielle union sacrée de la gauche à Marseille depuis des mois. Mais «aujourd'hui, on considère que ça ne marche pas, argumente le militant vert. Il faut d'abord se mettre d'accord sur le contrat à proposer aux Marseillais, sur la façon dont on construit une liste hybride entre les citoyens et les partis.» L'aspirant candidat dispose depuis la semaine dernière d'un nouvel atout pour convaincre ses camarades. Un sondage réalisé par l'institut Elabe pour la Tribune et BFM TV place EE-LV entre 14 % et 17,5 % des intentions de vote à Marseille, loin derrière le RN et LR mais loin devant d'autres listes de gauche.

De quoi réjouir le secrétaire national d'EE-LV, David Cormand. «Face au statu quo des héritier·e·s de l'ère #Gaudin et à la tentation du pire avec l'extrême droite, l'alternance positive passe par l'écologie. Un nouveau cycle s'ouvre pour construire l'espoir», a tweeté le patron des écolos sur le départ dès la publication du sondage. Alliance ou pas à Marseille, les instances nationales d'EE-LV ont de toute façon rappelé la règle pour les municipales : il n'y en a pas, on gère au cas par cas. La motion portée par Sébastien Barles, attaché parlementaire de la députée européenne Michèle Rivasi, a toutefois reçu le soutien de quelques personnalités des Verts, comme Yannick Jadot ou Eva Joly.

«Message»

Mais pas Michèle Rubirola : samedi, cette élue EE-LV au conseil départemental sera la seule référente locale à ne pas voter pour la liste indépendantiste. «Le but, ce n'est pas de se faire plaisir et d'arriver troisième comme dans ce sondage, mais d'être en situation de gouverner la ville, renvoie celle qui a signé le texte du Mouvement sans précédent. Tous unis d'un côté et nous de l'autre, quel est le message pour les électeurs ? Les Marseillais veulent l'union, c'est ça qu'ils n'entendent pas !»

Du côté des pro-alliance, on a du mal à comprendre. «On a vraiment l'impression que ce sont des intérêts personnels qui sont en jeu», tacle Sophie Camard. Cette ancienne d'EE-LV, désormais suppléante de Jean-Luc Mélenchon, a bataillé des mois dans son propre camp pour faire passer la pilule de l'union à des militants d'abord réticents à jouer collectif, notamment avec les socialistes. Samedi dernier, les insoumis marseillais sont finalement tombés d'accord pour travailler avec le Mouvement sans précédent. «Toutes les formations politiques ont eu la pression des mouvements citoyens pour partir ensemble, relève Sophie Camard. Ils nous ont dit "Ne comptez pas sur nous pour être récupérés par l'un d'entre vous mais on peut imaginer quelque chose si vous êtes tous ensemble". Là, même les plus radicaux ne comprennent pas l'attitude d'EE-LV…»

Sébastien Barles se défend de jouer les diviseurs de gauche. «Il y a une attente unitaire chez les Marseillais, c'est certain. Mais l'unité, ce n'est pas suffisant, insiste-t-il. Il y a un risque de s'enliser dans une liste sans réelle représentativité des citoyens, ce qui risque de générer une déception plus forte encore. C'est pour cela que l'on veut être cette liste refuge si ça foire.»

Jeudi, les partisans de l'union ont lancé une ultime offensive avant le vote des militants écologistes, publiant une tribune dans le quotidien la Marseillaise, intitulée «Le vote du siècle». Les signataires – une cinquantaine d'acteurs de terrain, élus ou personnalités, comme le réalisateur Robert Guédiguian ou l'actrice Ariane Ascaride… – appellent les militants EE-LV à se saisir de cette «opportunité historique de gagner» en optant pour l'union. «L'initiative est partie de militants écolos et, plus largement, d'électeurs qui ont régulièrement voté EE-LV, raconte Michèle Rubirola, la seule référente EE-LV favorable à l'alliance. L'idée était de montrer que les voix de l'écologie n'appartiennent pas à EE-LV, et que celles qui appartiennent à EE-LV peuvent aussi aller vers un rassemblement qui soit plus en mesure de faire gagner leurs idées. Car divisés, on perd.»