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Au rapport

La Cour des comptes préconise un jour de carence obligatoire sur les arrêts maladie

Dans son rapport sur la Sécurité sociale, les experts proposent d'assortir les arrêts maladie des salariés d'un jour de carence «d'ordre public» non indemnisé. Ni par la Sécu, ni par les entreprises.
The plaque on the facade od the Court of Auditors' building is pictured within its solemn hearing to mark the beginning of the year, on January 22, 2018 in Paris. (Photo by ludovic MARIN / AFP) (Photo Ludovic Marin. AFP)
publié le 8 octobre 2019 à 10h01

Prenant appui sur la plongée dans le rouge des comptes de la Sécurité sociale, la Cour des comptes revient à la charge. Dans son rapport rendu public ce mardi, l'institution de la rue Cambon fait sienne la proposition, déjà avancée en février 2019 par trois experts missionnés par Matignon, afin d'enrayer la hausse des arrêts de travail et des indemnités journalières afférentes : instaurer un jour de carence obligatoire pour tous, c'est-à-dire non payé, en cas d'arrêt maladie.

Interdiction de compenser

C'est déjà le cas dans la fonction publique. Dans le privé, les salariés ont théoriquement trois jours de carence, mais ces derniers sont souvent pris en charge par leur employeur dans le cadre d'un accord de branche ou d'entreprise. Ce qui limite l'effet dissuasif. Du coup, c'est un jour de carence «d'ordre public», à savoir que les entreprises auraient interdiction de compenser, que les magistrats préconisent d'instaurer.

Pour étayer sa proposition, la Cour des comptes aligne les chiffres. En 2017, la Sécu a dépensé 14,5 milliards d'euros pour les indemnités journalières (accidents du travail, maternité, maladie…), dont 12,9 milliards pour le secteur privé. Si elles ne représentent que 7,4 milliards d'euros, les indemnités versées uniquement au titre de la maladie se révèlent en augmentation : 4,2% de hausse par an en moyenne entre 2013 et 2017. À comparer au 2,2% de progression de la part de la masse salariale qui sert d'assiette de calcul aux indemnités. «Cet écart affecte l'équilibre financier de l'assurance maladie, principalement financée par des prélèvements sur les revenus du travail», martèle le rapport. «Il traduit l'augmentation de la proportion d'assurés ayant bénéficié d'au moins un arrêt de travail, du nombre moyen d'arrêt par assuré, et plus encore, de la durée moyenne des arrêts, passée de 31,2 à 33,5 jours entre 2013 et 2017.»

Responsabilité des médecins

La faute, en partie, à la hausse du taux d'emploi des salariés les plus âgés sous l'effet des réformes successives des retraites. Aux conditions de travail parfois. Mais de l'avis de la Cour, les médecins ont leur part de responsabilité dans l'affaire. «Sur 700 à 1 000 médecins considérés par la Cnam comme "surprescripteurs" par rapport à leurs confrères, seules 47 mises sous objectif et 39 mises sous accord, seules mesures véritablement contraignantes, ont été prononcées en 2018», s'étonne la Cour qui réclame un renforcement des contrôles.

Pour les experts de la rue Cambon, le jour de carence obligatoire aurait le mérite d'envoyer à tous - salariés, employeurs et médecins - un «signal» susceptible de jouer sur la fréquence des arrêts maladie. Pourtant, la Cour le reconnaît en creux : telle mesure ne modifierait sans doute pas fondamentalement l'addition pour la Sécu. Pour cause, en 2017, les arrêts de plus de 6 mois représentaient 6,2% des arrêts mais 44,6% des dépenses de la Sécu…