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Présidence de LR : Christian Jacob, un chasseur sachant chauffer la place

Le patron des députés Les Républicains devrait, sauf surprise, être élu dimanche à la tête du parti. Avec pour missions de refonder une formation en ruines et de préparer une présidentielle à laquelle il ne pourra pas participer.
Christian Jacob, candidat à la présidence de LR, lors des journées parlementaires du parti, jeudi, à Belfort. (Photo Sébastien Bozon. AFP)
publié le 11 octobre 2019 à 20h06

Tout au long de sa campagne électorale, Christian Jacob n'a eu de cesse de marteler les mots de rassemblement et d'ouverture. Le seul message que pouvait tenir le patron des députés LR à l'Assemblée nationale qui, selon toute probabilité, risque de se retrouver ce dimanche soir, dès le premier tour, élu à la tête d'un parti «éparpillé façon puzzle». «Durant cette campagne, il n'a pas pris beaucoup de risques. Il n'a pas dit grand-chose», constate un cadre du parti. Contrairement à ses deux concurrents, plus jeunes : Julien Aubert, député du Vaucluse, et Guillaume Larrivé, député de l'Yonne, qui ont affiché des lignes plus dures.

Les cadors de LR, à commencer par les députés, louent tous les qualités de Jacob à la tête du groupe. Le député de Seine-et-Marne et ancien maire de Provins «est un homme de consensus. Au sein du groupe, il a réussi à faire coexister toutes les sensibilités sans heurts et sans autoritarisme. Même si cela n'a pas toujours été simple. Il a réussi également à endiguer l'hémorragie de nos troupes lors de l'offensive lancée par Darmanin pour débaucher nos députés», souligne un élu qui le soutient. Parmi les qualités les plus souvent citées pour décrire celui qui, à l'origine, est un agriculteur entré en politique via le syndicalisme agricole et parrainé par Jacques Chirac (auquel il sera resté toujours fidèle) : une manière de caresser les gens dans le sens du poil, une forme de pragmatisme, de bon sens terrien. «Disons que je suis souvent là où l'on ne m'attend pas», dit de lui-même tout sourire ce chasseur impénitent à l'adresse de ceux qui le mésestimeraient.

Transition

Elu pour la première fois au Parlement européen en 1994, plusieurs fois ministre, ayant enquillé les responsabilités au sein du RPR puis de l’UMP sans subir de disgrâce, Jacob va devoir s’atteler cette fois à un chantier de taille. A lui s’il est élu de remettre sur pied un parti en ruines, laminé par trois défaites successives (présidentielle, législatives, européennes), et surtout de le préparer pour 2022.

Le prochain président de LR s'étant engagé à ne pas être candidat à la présidentielle, il lui reviendra d'organiser les conditions de désignation de celui ou celle qui représentera LR dans la course à l'Elysée. «Et ce n'est pas là le moindre écueil auquel le prochain président va être confronté. Après les municipales, toutes les ambitions vont se réveiller. Jacob a au moins une qualité, il ne sera pas l'homme d'un clan», veut croire un député LR.

Après Jean Léonetti président par intérim, le prochain patron de LR pourrait n'être qu'un président de transition dont la principale mission consisterait à chauffer la place pour le candidat à la présidentielle. «Si c'est une présidence de transition, alors elle sera brève car nous serons morts avant 2022», tranche Bruno Retailleau, patron des sénateurs LR, qui attend du nouvel élu qu'«il change tout du sol au plafond».

Jean-François Copé ne dit pas autre chose en estimant que le prochain président doit être celui de «la reconstruction» : «Christian Jacob est un professionnel. Il saura rouvrir les portes et les fenêtres.» Tous attendent en tout cas une redéfinition idéologique du parti, «loin de la ligne politique rabougrie qu'avait imposée Wauquiez», pointe un poids lourd. «Nous devons dire aux Français quelles sont nos idées, ce que nous voulons, ce que nous leur proposons. Aujourd'hui, plus personne ne sait ce que nous avons à dire», déplore Retailleau. Selon lui, «la droite doit réoccuper tout son périmètre. Il y a une exigence à porter et du courage à avoir».

Vocations

Christian Jacob n'a jamais caché sa volonté de faire revenir au sein de la maison LR deux personnalités qui font figure de présidentiables en puissance mais qui ont quitté le parti. A savoir Valérie Pécresse, la patronne de la région Ile-de-France, et Xavier Bertrand, celui des Hauts-de-France. «Ce n'est pas impossible qu'il y parvienne. Il a la ténacité pour. Et de toute façon, c'est dans leur intérêt de revenir autour de la table afin que nous réfléchissions tous ensemble à la manière dont nous désignerons notre leader pour 2022», estime un sénateur LR.

Outre ces deux possibles prétendants, d’autres se profilent à l’horizon. Gérard Larcher, le président du Sénat ne l’exclut pas complètement. Certains évoquent également les noms de François Baroin, avec lequel Christian Jacob est très lié, ou encore celui de Bruno Retailleau. Sans compter les vocations qui vont encore éclore. Pour départager tous ces concurrents faudra-t-il organiser à nouveau une primaire ? Ouverte à tous ou réservée aux seuls adhérents ? Nombreux au sein de LR sont opposés à ce système jugé mortifère. Le prochain président de LR devra trancher, ce ne sera pas une sinécure.