L'homme est régulièrement décrit comme l'un des maillons essentiels de «l'affaire Epstein» pour sa proximité avec le magnat américain, accusé d'avoir exploité sexuellement des dizaines de filles mineures entre 2002 et 2005 et d'avoir monté un vaste réseau. Et pour cause : Jean-Luc Brunel, l'ancien patron de l'agence de mannequins Karin Models, entretenait des liens financiers et amicaux avec Jeffrey Epstein, mort en prison début août d'un «suicide apparent», selon les termes du procureur de New York. Le 23 août, une enquête concernant de potentielles ramifications françaises a été ouverte par le parquet de Paris, pour «viols» et «agressions sexuelles». Ce jeudi marque un tournant puisqu'une première plainte a été enregistrée par la justice, a révélé LCI.
La plainte a été déposée par une femme d'une vingtaine d'années et porte sur des faits de «harcèlement sexuel», confirme le parquet de Paris, contacté par Libération. Dans un courrier adressé quelques jours plus tôt, celle-ci dénonce des agissements qui ne seraient pas prescrits puisqu'ils auraient moins de quatre ans, selon nos informations. La plaignante devrait être entendue prochainement par les agents de l'Office central pour la répression des violences aux personnes (OCRVP).
Sept personnes déjà entendues en France
La plainte de la jeune femme – qui n'est pas une mannequin de l'agence – marque une première dans le dossier. Jusqu'à présent, Jean-Luc Brunel, soupçonné d'avoir joué un rôle de rabatteur pour Epstein, a pu être accusé de viols ou d'agressions sexuelles, mais sans dépôt de plainte. Une source judiciaire précise à Libération que sept personnes ont été entendues en France dans le cadre de l'enquête, certaines dénonçant des faits prescrits. La dernière jeune femme à avoir porté plainte sera donc la huitième.
A lire aussi Sur les pistes françaises de l'affaire Epstein
Aux Etats-Unis, où les investigations se poursuivent, l'une des plaignantes, Virginia Roberts Giuffre, 35 ans, a évoqué le rôle de Jean-Luc Brunel. «Il amenait ces filles, âgées de 12 à 24 ans, aux Etats-Unis à des fins sexuelles et les remettait à ses amis, Epstein compris. Mon sentiment, c'est que Brunel obtenait ses filles d'Europe de l'Est», a-t-elle détaillé dans sa plainte. Ce que conteste vivement Jean-Luc Brunel qui n'a, pour le moment, jamais été interrogé par la justice française. S'il a été vu dans une soirée huppée à Paris au mois de juillet, il n'est pas réapparu publiquement depuis. Selon le Parisien, les enquêteurs l'ont géolocalisé à l'étranger, en Amérique du Sud, le 23 septembre. Son avocate, qui indique à Libération qu'elle ne souhaite pas s'exprimer tant que son client de 74 ans n'a pas été convoqué, assure néanmoins qu'il se tient «à disposition de la justice» et qu'il n'est pas en fuite.
Deux perquisitions à Paris
Dernièrement, deux perquisitions ont lieu dans l'affaire. La première il y a exactement un mois dans les locaux de l'agence Karin Models, fondée en 1978 et située dans le VIIIe arrondissement de Paris. Les policiers de l'OCRVP se sont notamment intéressés aux archives. Par la suite, ils ont passé au crible le luxueux appartement de Jeffrey Epstein, avenue Foch, comme l'avait révélé France Info. Soit une demeure de 800 m² et pas moins de 50 pièces. Là encore, les enquêteurs ont saisi des documents. Un peu tard ? Selon plusieurs associations de protection des mineurs, l'appartement pourrait avoir été «nettoyé» entre-temps.