L'affaire des diurétiques continue de faire des vagues au gouvernement. Christian N., haut fonctionnaire au ministère de la Culture, a été mis en examen fin octobre pour avoir administré à leur insu des diurétiques à des jeunes femmes venues passer un entretien d'embauche dans le but de les voir uriner devant lui. Depuis près de dix ans, il les prenait aussi en photo discrètement avant de consigner ses «expériences» dans un fichier Excel. Comme l'expliquait Libération, les victimes – plus de 200 à ce jour, selon une liste rédigée par le harceleur lui-même – sont dans une impasse. Une cellule d'écoute a bien été ouverte pour recevoir leur parole mais la plupart n'ont jamais été entendues ni même contactées. Cette situation crée des remous entre cabinets ministériels. Sur Europe 1 vendredi matin, Franck Riester, dont le cabinet n'avait pas donné suite à nos sollicitations, s'est contenté de répondre que «la justice [allait] prendre les décisions qui s'imposent».
«Bon interlocuteur»
Pour les victimes, c'est insuffisant : elles veulent des explications. Pourquoi le ministère de la Culture ne les a pas reçues une fois les faits connus et Christian N. révoqué ? Parmi elles, Alizée avait décidé de contacter directement le cabinet de Marlène Schiappa, qui l'avait aidée dans son entreprise. L'entourage de la secrétaire d'Etat confirme d'ailleurs ces échanges auprès de Libération : «Une conseillère de Marlène Schiappa a passé énormément de temps à l'écouter et accompagner cette démarche pour l'orienter vers le bon interlocuteur.» Le bon interlocuteur en l'occurrence était Agnès Saal, haut fonctionnaire à l'égalité au ministère de la Culture, qui «devait contacter Alizée» selon l'entourage de Marlène Schiappa. Après la parution de l'enquête, certains enragent au gouvernement. D'après nos informations, Agnès Saal a été interrogée vendredi matin et elle a assuré avoir contacté Alizée. Version que conteste fermement cette dernière depuis le début de l'affaire : «C'est parfaitement faux, ni Agnès Saal ni la cellule d'écoute ne m'ont contactée.» Par ailleurs, selon cette même source gouvernementale, Agnès Saal n'était «pas capable de dire si la cellule d'écoute était toujours active».
Du côté de la Rue de Valois, c'est toujours silence radio. Agnès Saal, contactée à propos de ce couac, n'avait pas donné suite vendredi après-midi. C'est pourtant aujourd'hui vers le ministère de la Culture que se tournent tous les regards pour comprendre comment une telle situation a pu se produire. «Je ne sais pas», a éludé Franck Riester sur Europe 1. Dans l'entourage de Marlène Schiappa, on préfère le laisser prendre les choses en main : «Nous sommes persuadés que le ministre de la Culture prendra toutes les mesures nécessaires puisque cela relève de son champ d'autorité.» Dans une série de tweets, la secrétaire d'Etat à l'égalité entre les femmes et les hommes a par ailleurs tenu à apporter «tout [son] soutien chaleureux aux personnes victimes de ces agissements condamnables et indignes». Franck Riester, de son côté, a invité ses agents à «prendre la parole» et affirmé son souhait «d'accompagner ceux qui ont le courage de révéler ce genre d'affaires». Au sein d'une cellule d'écoute ?