L'élu RN Julien Odoul, qui avait agressé une femme voilée dans l'hémicycle du conseil régional de Bourgogne-Franche-Comté le 11 octobre, a-t-il été piégé par la mère de famille ? Cette thèse, selon laquelle Fatima E. aurait prémédité une provocation en portant le voile afin de générer un happening politique, a très tôt été partagée par l'extrême droite. Elle a bénéficié du relais plus inattendu du Président. Emmanuel Macron, dans son interview à Valeurs actuelles, fin octobre, a déclaré qu'Odoul s'était fait «coincer». Sur quoi se base-t-il pour l'affirmer ? L'Elysée n'a pas répondu aux nombreuses demandes de CheckNews.
Premier problème, la formulation présidentielle est trompeuse : elle suggère que le fait d'apparaître voilée dans l'hémicycle pouvait s'apparenter à une provocation. Or, du point de vue de la loi et du règlement intérieur du conseil régional de Bourgogne-Franche-Comté, Fatima E. était, dans ce contexte, autorisée à porter le foulard. En effet, le Conseil d'Etat en 2013 a entériné le fait qu'une accompagnatrice scolaire bénévole, considérée comme «usager», n'est pas tenue au devoir de neutralité religieuse imposé aux agents de services publics.
Surtout, l'idée d'une action préméditée n'est étayée par aucun élément. Au contraire, CheckNews a pu vérifier auprès de plusieurs sources que Fatima E., déjà impliquée dans les activités extérieures de l'école de son fils (en étant voilée, et sans que cela ne pose problème) avant l'incident du conseil régional, n'était pas prévue dans l'encadrement de cette sortie. La présidente de la FCPE du Territoire de Belfort, qui est au contact de l'équipe enseignante, explique ainsi : «Elle accompagnait régulièrement les sorties scolaires, son fils étant scolarisé dans cet établissement depuis deux ans déjà.» Et de poursuivre : «Elle était en train de déménager et n'avait pas de solution de garde pour sa petite fille. Elle a d'abord dit qu'il était compliqué pour elle d'accompagner la sortie à Dijon. Peu de temps avant la date du départ, la maîtresse a sollicité Fatima parce qu'elle se trouvait coincée vu le faible nombre d'accompagnateurs disponibles. Elle s'est donc arrangée pour y participer.» Des éléments qui contredisent la théorie d'un happening concerté en amont.