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Libération

Banditisme : mort de «l’Immortel» Jacky le Mat

par Stéphanie Harounyan, correspondante à Marseille
publié le 12 novembre 2019 à 20h46

Le 1er février 1977, aux alentours de 20 heures, Jacky Imbert rentre chez lui à Cassis après une partie de belote. Alors qu'il se gare, trois hommes cagoulés ouvrent le feu sur lui. Il est touché de 22 balles, perd un œil, écope d'un bras quasi paralysé, mais survit, décrochant le surnom de «l'Immortel». Avant cette tentative d'assassinat, cette figure de la pègre marseillaise en avait déjà un : Jacky le Mat, «le fou» en gouaille de truand du Sud. Immortel, ou presque : il est mort lundi à Aix-en-Provence. De vieillesse, à 89 ans

Né à Toulouse en 1929, c'est à Paris qu'Imbert lie son destin à celui des grandes figures du banditisme marseillais d'alors. Dans un cabaret du IXarrondissement, il rencontre Tany Zampa, alors étoile montante du milieu, qu'il aidera à gagner ses galons de «patron».

Installé à Marseille au milieu des années 60, Imbert fréquente le milieu des courses. et est même sacré champion de France amateur de trot. Jusqu’à ce qu’en 1974, son implication dans une affaire de courses truquées ne le bannisse des hippodromes.

Dès 1968, Jacky Imbert est fiché au grand banditisme. Le Mat mène sa propre carrière, émancipé du clan Zampa, lequel est devenu le parrain incontesté du milieu marseillais. C'est l'allié des débuts qu'Imbert soupçonne d'être à l'origine de la tentative d'assassinat de 1977. Il se confiera sur le sujet au Nouvel Obs : «Je crois en la justice divine. Je n'ai jamais su qui étaient ceux qui m'ont tiré dessus, mais la rumeur a désigné des coupables.» Abattu pour deux d'entre eux, Zampa s'étant suicidé en prison en 1984.

La justice aura du mal à prendre le Mat la main dans le sac. En 1993, il avait été arrêté lors d'un coup de filet. Incarcéré pour «association de malfaiteurs», il avait été libéré un an et demi plus tard. En 2004, par le jeu des prescriptions, son casier est vierge quand il est condamné à quatre ans de prison pour un projet de contrebande de cigarettes… puis relaxé en appel.

Lors de son dernier passage au tribunal, devant la cour d'appel d'Aix en 2008, celui qui se présentait comme un «paisible retraité du show-biz» écope de deux ans de prison ferme, pour une affaire d'extorsion de fonds remontant aux années 90. Depuis quelques années, il vivait en toute discrétion près d'Aix. En 2007, lorsque Franz-Olivier Giesbert sort son livre l'Immortel, il évitera les sollicitations des journalistes. A l'été 2014, il s'était tout de même livré au journal la Provence, un peu nostalgique : «Marseille n'est plus tenue par personne, regrettait-il alors. On ne respecte plus rien.»