«Nous n’avons pas changé radicalement après la crise des gilets jaunes. Mais nous avons approfondi ce que nous faisons depuis le début de notre mue en 2014. C’est à ce moment-là que nous avons abandonné le journalisme local "miroir", à l’ancienne, pour nous rapprocher des préoccupations concrètes des gens. C’est-à-dire qu’on ne fait plus le reportage sur le sapin de Noël de telle association ou le banquet des anciens de telle commune, des événements qui n’intéressent que ceux qui y participent. Cela correspondait à une époque où les gens aimaient se voir dans le journal.
«C'est différent aujourd'hui : les lecteurs considèrent désormais que cela se mérite d'être dans le journal. On ne va plus voir une association que si son action a un effet sur la communauté locale. Cela traduit notre envie de nous concentrer sur des sujets de vie quotidienne et de fond. Par exemple, à Douai, il y a un problème de feux rouges qui rendent le centre-ville difficile d'accès. C'est un sujet pour la Voix du Nord. Pour coller aux préoccupations des gens, on développe le lien physique. Dès octobre 2017, nous avons organisé des "cafés lecteurs", pour les rencontrer dans des bistros, de façon très libre. C'était un an avant les gilets jaunes…
«Cette crise nous a conduits à creuser encore plus ce sillon : nous venons de lancer une série de 75 réunions locales afin de célébrer les 75 ans du journal. Le directeur général, le directeur de la rédaction ou moi, nous allons avec des journalistes dans des endroits où on ne va pas souvent. La semaine dernière, j’ai animé un rendez-vous au "club-house" du club de foot d’Aniche, une ville de 10 000 habitants. On ne rassemble pas toujours 200 personnes… Nous avons la volonté d’aller au plus près des gens. Ils nous demandent plus d’engagement pour le territoire et les habitants. Le mois dernier, on a lancé une campagne contre le harcèlement scolaire. La semaine dernière, on a formulé huit propositions que nous allons remettre à la rectrice de l’académie. C’était à la une du journal.»