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Libération
Épilogue

La liberté retrouvée de Vincenzo Vecchi

Visé par deux mandats d'arrêt européens, l'ancien militant altermondialiste italien vient d'être libéré par la cour d'appel de Rennes.
Vincenzo Vecchi en novembre 2019, à Rennes. (Photo Loïc Venance. AFP)
publié le 15 novembre 2019 à 18h20

La décision a été accueillie par les vivats de ses nombreux soutiens. Incarcéré depuis plus de trois mois et menacé d'être remis aux autorités italiennes, Vincenzo Vecchi a été libéré vendredi par la cour d'appel de Rennes. Condamné à douze ans et demi de prison pour «dévastation et pillage» lors du sommet du G8 de Gênes, en 2001, l'ancien militant altermondialiste était visé par un mandat d'arrêt européen jugé «irrégulier» par les magistrats français. Ce n'est pas le seul vice de forme ayant entaché cette étrange procédure judiciaire. Interpellé le 8 août dans le Morbihan, où il vivait sous un faux nom depuis plusieurs années, Vecchi était en effet visé par un autre mandat d'arrêt concernant des faits commis lors d'une manifestation contre l'extrême droite à Milan, en 2006. Or cette peine avait déjà été entièrement purgée, comme l'a reconnu la cour d'appel de Rennes le 24 octobre. Lors de cette audience décisive, l'Italien a dénoncé une «politique de traque et de vengeance».

Son arrestation avait suscité une vive émotion à Rochefort-en-Terre, le petit village du Morbihan où Vecchi avait refait sa vie comme peintre en bâtiment. Au cours des semaines suivantes, des comités de soutien ont fleuri un peu partout en Bretagne, mais aussi à Milan, Séville, Bologne ou Bruxelles. Mobilisant juristes, universitaires et intellectuels, les proches de l'Italien se sont évertués à faire la lumière sur ce dossier judiciaire emblématique et le contexte si particulier dans lequel il s'inscrit. Vincenzo Vecchi a ainsi été condamné sur la base d'un article du code pénal italien introduit en 1930 sous le gouvernement Mussolini, permettant d'incriminer des militants au motif de leur seule présence à une manifestation, sans avoir à démontrer une quelconque culpabilité individuelle. De plus, la peine très lourde infligée à Vecchi, près de treize ans, tranche singulièrement avec la clémence dont ont bénéficié les policiers poursuivis en justice. Le sommet de Gênes, qui s'est soldé par un mort et 600 blessés parmi les manifestants, reste pourtant le symbole d'un usage disproportionné de la violence par les forces de l'ordre, l'ancien chef de la police italienne ayant lui-même admis des scènes de torture.

A travers le cas de l'Italien, certains de ses soutiens dénoncent aussi un «dévoiement» du mandat d'arrêt européen. «Cette procédure porte en soi atteinte à la liberté, a réagi Eric Vuillard, prix Goncourt 2017, très investi dans la défense de Vincenzo Vecchi. Le mandat d'arrêt européen est émis pour toute l'Union européenne, en revanche la décision qui l'infirme n'est valable que dans le pays où elle a été prise. Il n'y a donc pas d'espace juridique européen, c'est un leurre destiné à soutenir une politique répressive. On ne doit pas échanger des gens comme des marchandises.»