«J'ai tant appris de vous !» Devant quelque 5 000 maires rassemblés à Paris pour leur 102e congrès, Emmanuel Macron a livré mardi une vibrante déclaration d'amour. Hué et sifflé en 2017 lors de sa première participation à ce rendez-vous annuel, il avait dû sécher l'édition 2018, craignant un accueil plus froid encore. Il est vrai que les sujets de frictions ne manquaient pas. Très remonté contre le développement à marche forcée de l'intercommunalité décidé sous Hollande, la majorité des maires de France avaient été bousculés et exaspérés par ce jeune président venu de nulle part, jamais élu et jamais candidat, cachant à peine son mépris pour le clientélisme et le conservatisme de bien des notables locaux.
Deux ans après, changement de ton radical. Le chef de l’Etat dit avoir été profondément marqué par ses dizaines d’heures de «grand débat» avec les maires. De ces séances marathon au cours desquelles il s’est appliqué à faire la démonstration de sa maîtrise des dossiers locaux, Emmanuel Macron espère qu’elles auront permis de le débarrasser de son image de président des métropoles. La crise des gilets jaunes l’aurait ébranlé et même métamorphosé : c’en serait fini du culte de la verticalité et du mépris des corps intermédiaires.
Faire avec les maires : telle serait donc la nouvelle priorité de Macron. «J'ai tant appris de nos échanges», a-t-il lancé aux élus. «Et si mon parcours diffère quelque peu de celui de Jacques Chirac, ces heures passées à vos côtés ont agi et agissent pour moi comme un concentré d'expérience», a-t-il ajouté, alors que le congrès venait de rendre hommage à l'ex-président, longtemps maire de Paris. A défaut d'avoir été lui-même à la tête d'une mairie, Macron affirme se sentir désormais, «Maire de la commune France».
Ignorant superbement l’interpellation du président du Sénat, Gérard Larcher, qui disait mardi matin sa colère contre le gouvernement (à propos de la loi engagement et proximité portée par Sébastien Lecornu), Macron a consacré l’essentiel de son discours aux sujets régaliens, laissant à son Premier ministre le soin de répondre jeudi, en clôture du congrès, aux questions «techniques» sur les finances locales, les compétences et la décentralisation.
Il s'est notamment attardé sur la question abondamment commentée ces dernières semaines de la laïcité et des «listes communautaires», dont le chef du groupe LR au Sénat, Bruno Retailleau, réclame l'interdiction par la loi. Macron lui a opposé une fin de non-recevoir : «il ne s'agit pas de proclamer l'interdiction pour régler le problème», a-t-il fait valoir, soulignant qu'il était impossible de les définir, faute de «critères» pertinents.
A cette vaine entreprise législative, il oppose un «combat politique» contre «ceux qui développent un projet communautariste de division de la Nation» et qui «très souvent se dissimulent». Ce qui compte, «c'est de faire tomber les masques de ceux qui combattent la devise inscrite sur les frontons des mairies qu'ils convoitent», a-t-il conclu.