Menu
Libération
Communautarisme

Francis Chouat (LREM) : «Pour l’adhésion à la République, on n’a pas fait assez»

Le député de l'Essonne, apparenté LREM, mène avec trois de ses collègues une mission pour le groupe majoritaire sur la lutte contre le communautarisme.
Francis Chouat (à droite) lors du lancement de l'opération «Quartiers de reconquête républicaine» avec le maire de Corbeil-Essonnes Jean-Pierre Bechter, en septembre 2018. (Marc CHAUMEIL/Photo Marc Chaumeil pour Libération)
publié le 6 décembre 2019 à 11h52

Peu au clair sur les questions régaliennes, la majorité tente de se trouver une doctrine. Le patron des députés LREM, Gilles Le Gendre, a confié à quatre parlementaires une mission sur la lutte contre le communautarisme. Ancien maire d'Evry (Essonne) et proche de Manuel Valls, le député apparenté En Marche Francis Chouat propose notamment de créer des comités réunissant Etat et élus «pour évaluer ces situations complexes».

Fin novembre, le ministre de l’Intérieur a demandé aux préfets, dans une circulaire, de renforcer le «combat» contre le «communautarisme». Le parti LREM a fait des recommandations «pour armer» les futurs maires sur le sujet. Qu’est-ce que votre mission doit apporter de plus ?

Ces initiatives complémentaires participent d’une même mobilisation pour la reconquête républicaine des territoires. Depuis de trop nombreuses années, des mécanismes gangrènent des quartiers travaillés par les discriminations, la pauvreté et l’insécurité. Recul de la mixité sociale, taux élevés de chômage et d’absentéisme scolaire, expansion des trafics : a priori, ces éléments ne semblent pas liés au communautarisme. Ils constituent en fait un terreau sur lequel les phénomènes de séparation prospèrent. Le premier axe, c’est de renforcer les politiques sociales. Mais on a trop cru que les politiques de rénovation urbaine, d’éducation, de logement régleraient la question de l’adhésion du plus grand nombre à la promesse républicaine. Ce n’est pas le cas.

Ces politiques ont-elles failli à créer une égalité des chances ?

Elles ne seront bien sûr jamais suffisantes, même si on a fait beaucoup. Mais pour ce qui est de l'adhésion à la République dans ces territoires en voie d'«archipelisation» selon le terme de Jérôme Fourquet, on n'a pas fait assez. On ne peut pas réduire le combat de «la République partout et tout le temps» à la seule addition de ces mesures. Il faut nouer sur le terrain une alliance qui mêle l'appareil d'Etat et les élus.

Quelles actions mèneraient-ils ensemble ?

Les maires sont en première ligne et éprouvent souvent un grand désarroi. Arrêtons de les laisser se débrouiller ou, pire, trouver seuls des solutions d’accommodement. Des comités pourraient se réunir pour évaluer ces situations complexes. Il faudrait notamment renforcer les contrôles auprès des familles qui décident de déscolariser leurs enfants. Et je préconiserai qu’une association recevant des subventions signe une charte d’adhésion aux valeurs de la République dont la laïcité. Dans les hôpitaux, les personnels peuvent se trouver démunis face au comportement de certains patients. L’élaboration d’une charte et une formation à la laïcité assureraient les personnels d’un niveau de confiance pour apprécier les situations.

Vous évoquiez les politiques d’éducation et de logement. Que proposerez-vous pour renforcer la présence de la République dans ces domaines ?

On doit continuer de mettre le paquet sur l’éducation, développer le continuum éducatif, y compris hors de la classe, dans les quartiers prioritaires. En matière de logement, il faut une action concertée sur les attributions. A titre personnel, je plaide pour une option radicale : après le départ de ses occupants, organiser la vacance d’un logement social tant qu’on n’a pas réussi à recréer une mixité. La pression des demandeurs de logements est légitime mais on doit enrayer ce processus de ségrégation.

Les députés LREM sont très divisés sur des sujets comme la laïcité. Vous sentez-vous vraiment au barycentre du groupe ?

Mon rôle, c’est de m’y situer mais pas au prix de je ne sais quelle mollesse. Je ne confonds pas la lutte contre le communautarisme et la prise en compte de la diversité de la société française. Comme maire d’Evry, j’ai travaillé avec des centaines d’associations qui font vivre des trajectoires et des cultures. Arrêtons de nous enfermer dans l’idée que la lutte contre le communautarisme serait un combat contre les cultures et les religions. Quand nous avons présenté notre mission au bureau exécutif de LREM, nous avons reçu un large assentiment.

Vos propositions déboucheront-elles sur une proposition de loi ?

On ne va pas se lancer dans une machinerie législative. On ne croit pas, comme Bruno Retailleau (LR) qui voulait interdire les listes communautaires, qu’il faut toujours des lois nouvelles. L’idée est de remettre d’ici dix jours un document donnant lieu à un débat au sein du groupe.