La mobilisation des profs, jeudi, a été de très grande ampleur, et inédite depuis 2003. Tout le monde s'accorde sur ce point. Ce qui n'est pas le cas concernant le taux de grévistes. A la mi-journée, le ministère annonçait 51,15 % de grévistes dans le primaire et 42,32 % dans le secondaire. Le Snuipp-FSU (principal syndicat dans le premier degré) comptabilisait de son côté 70 % d'enseignants grévistes. Et dans le secondaire, Sophie Vénétitay, du Snes-FSU, avançait une participation «historique» avec «75 % de grévistes dans les collèges et les lycées». Comment expliquer cet écart ? Le ministère avait déjà expliqué à CheckNews sa méthode : «Nous prenons en compte le nombre d'absents sur l'effectif total.» Cela signifie par exemple que si, dans la matinée, 15 enseignants sont absents sur les 300 que compte un établissement, le ministère retiendra un taux de gréviste de 5 %.
Une méthode, très contestée par les syndicats, qui conduit à sous-évaluer l'ampleur de la mobilisation. Le Snes, de son côté, «compte par rapport au personnel attendu à 8 heures ou à 9 heures». Cette méthode permet de connaître le taux de grévistes par rapport aux enseignants qui devaient être en classe au moment du décompte… et non pas la totalité de l'effectif d'un établissement. Ce qui change tout : les professeurs certifiés du secondaire ont dix-huit heures de présence hebdomadaires devant les élèves.
Cela explique en bonne partie la forte divergence entre les deux calculs. S'il dénonce donc la sous-évaluation des chiffres du ministère, le Snes concède que les chiffres syndicaux peuvent présenter un biais dans l'autre sens. Le syndicat collecte ses données à partir des remontées d'établissements qui sont «plutôt des établissements mobilisés». D'où des chiffres qui peuvent «être surévalués». Dans le primaire, les enseignants sont présents en général dès le matin. Par ailleurs, au nom du service minimum d'accueil, les professeurs des écoles doivent déclarer leur intention de faire grève au moins quarante-huit heures avant. Il y a donc moins d'imprévus, et en général moins d'écart dans les comptages. Pauline Moullot