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Grèves

Syndicats : les réformistes secoués par la base

CFTC, Unsa, CFDT… Trois centrales dont les directions nationales n’appellent pas à manifester ce mardi, mais dont des sections locales ou branches défileront.
Manifestation à Toulouse, jeudi. (Photo Frédéric Lancelot. Divergence)
publié le 9 décembre 2019 à 20h56

Ils sont quatre syndicats à avoir signé l’appel pour une «journée massive de grève et de manifestations» contre la réforme des retraites, ce mardi. Sans la CGC qui, contrairement au 5 décembre, a décidé de se mettre en retrait mais sera présente dans plusieurs départements. Car loin de Paris et des décisions des directions confédérales, le paysage syndical est à géométrie variable. Et d’autres couleurs syndicales viennent se mélanger aux drapeaux des centrales aux avant-postes de la mobilisation. C’est le cas dans le Gard et la Lozère, où l’Union interdépartementale (UID) de la CFTC appelle à battre le pavé ce mardi. Le 5 décembre, les drapeaux bleu foncés de ces «réformistes» avaient déjà flotté dans le ciel de Nîmes.

«Amalgames»

Mi-novembre, tout en n'appelant pas à la grève, la centrale avait «laiss[é] le choix» à ses syndicats de manifester ou non. «C'est le principe de la CFTC. La confédération n'a pas souhaité appeler à faire grève car ils pensent qu'il y a moyen de discuter. Mais cela n'empêche pas les organisations locales de le faire», explique un membre de l'union interdépartementale. Et d'ajouter : «Il y a quand même des moments où l'on ne peut pas faire autrement que de faire grève.» Ailleurs, comme à Douai (Nord), les drapeaux de la CFTC se sont aussi mêlés à ceux, entre autres, de la CGT. Au moins trois branches de la centrale avaient aussi fait le choix de se mobiliser, celles de la santé, de la fonction publique territoriale et des enseignants. Cinq jours plus tard, la première maintient son appel. «On a été sollicités par énormément d'agents nous demandant comment faire pour se mobilise r», explique Hélène Mika de la CFTC-santé dans le Nord. Elle reconnaît que sur le terrain, la position de la confédération peut «créer des amalgames». «Certains adhérents râlent, ils ne comprennent pas», poursuit la syndicaliste.

Même configuration du côté de l'Unsa. S'il n'y a pas d'appel national à rejoindre le mouvement, certaines structures de la centrale qui met en avant son «autonomie» n'ont pas hésité à descendre dans la rue. Ainsi, outre les transports, RATP et SNCF en tête, sa branche des enseignants était présente le 5 décembre sur le pavé. Dans l'Isère, les agents territoriaux de l'Unsa étaient aussi là, et ils ont envie de «continuer», explique leur secrétaire départemental : «On a pris la température et on a vu que la base était un peu amère.» Un autre responsable départemental Unsa confirme : «On a l'impression que les dirigeants ne l'écoutent pas. Pourtant, on leur fait des remontées. Ça risque de chauffer lors de prochaines grosses réunions. Il y a quelques années un autre syndicat réformiste y a laissé des plumes.» Allusion à la CFDT qui, en 1995, avait perdu des adhérents après avoir soutenu la réforme des retraites défendue par le gouvernement Juppé.

«Ni dociles, ni résignés»

Au sein du syndicat de Laurent Berger, les appels isolés sont plus timides. Certes, la fédération des transports de la CFDT a expliqué qu'elle était «dans le mouvement social», mais sur «des revendications particulières». «On n'a pas changé de position, on est dans l'appel à la grève mais lié à nos propres revendications, notamment la clause du grand-père, confirme le secrétaire général, Didier Aubert. On n'est plus à l'époque où la CFDT-cheminots se foutait sur la gueule avec la confédération. Nos revendications sont faites de concert avec Laurent Berger.» De son côté, la CFDT-Banque de France a signé un appel commun avec les autres syndicats de l'établissement, concerné par la fin des régimes spéciaux. «Dans l'ensemble il y a une grosse homogénéité du positionnement, en ligne avec la confédération», note Luc Mathieu, de la fédération CFDT-banques, qui reconnaît qu'il faut faire de la «pédagogie».

Jeudi dernier, on retrouvait quelques cédétistes dans les défilés. A Paris, ils avaient inscrit sur leur banderole : «Nous sommes la base», et «ni dociles, ni résignés». «On a manifesté pour aider Laurent Berger à négocier, sourit un représentant du Symnes, syndicat de la métallurgie de la CFDT en Ile-de-France et pour le Nord-Est, qui faisait partie du cortège le 5 décembre. On est pour ce qu'il défend, pour la réforme mais encore faut-il qu'elle soit bonne pour tous.» Un autre cédétiste de la métallurgie se confie : «Des voix s'élèvent chez nous contre les recommandations de Laurent Berger. Même dans nos ateliers, parfois, on se fait traiter de collabos, ce n'est pas facile.»