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Libération

Hépatite C : le dépistage général écarté par la HAS

publié le 10 décembre 2019 à 20h21

Dépister ou pas la population générale pour l'hépatite C (VHC) ? L'idée est tentante, d'autant que depuis quelques années, un traitement soigne et guérit la personne, éradiquant dans son corps toute trace du virus. Accessible à tous depuis 2017, il était auparavant limité à certains malades. C'est dans ce contexte que la Haute Autorité de santé (HAS) vient de rendre ses recommandations sur «la stratégie nationale de dépistage de l'hépatite C». Et celles-ci ne comprennent pas un «dépistage élargi à la population générale». A la surprise, voire colère des associations de patients, mais surtout de l'Association française pour l'étude du foie (Afef).

En matière de dépistage général de la population, les autorités ont toujours semblé hésitantes. Il y a dix ans, le plan de lutte contre le sida du gouvernement avait déclaré un dépistage généralisé, or celui-ci n’a jamais été mis en œuvre. Là, dans le cas du VHC, les données sont plus simples. En France, on estime que 133 000 personnes sont atteintes d’hépatite C chronique, dont 19 % seraient porteuses sans le savoir. Selon les objectifs fixés par l’Organisation mondiale de la santé, le virus de l’hépatite ne doit plus représenter une menace de santé publique d’ici à 2030. En somme, l’objectif est bel et bien d’éradiquer l’épidémie. Pour cela, l’enjeu est de dépister ceux qui ignorent leur statut.

Jusqu’à présent, la stratégie de dépistage ciblait les populations à risque : usagers de drogues par intraveineuse, partenaires sexuels des personnes atteintes d’hépatite C chronique, population carcérale et patients VIH ou porteurs du virus de l’hépatite B. Pour la HAS, la question était de voir si, économiquement, le dépistage ciblé ou universel était plus intéressant.

Pour élaborer son avis, la HAS dit avoir analysé toute la littérature scientifique. D’après ces données épidémiologiques, la proportion de personnes touchées par l’hépatite C chronique en France est en baisse. Après analyse, la HAS a conclu qu’il fallait plutôt renforcer le dépistage dans les populations les plus à risque.

«Cela nous semble totalement à côté de la plaque», a indiqué à Libération le Dr Marc Bourlière, président de l'Afef. «Le dépistage est mal fait, les 4 millions de tests réalisés chaque année en France ne touchent pas les bonnes catégories. On dépiste surtout les jeunes, alors qu'une grande partie des patients actuels sont des femmes de 40 à 70 ans ou des hommes assez âgés, qui ont été infectés avant la découverte du virus en 1989.» Aussi, pour le Dr Bourlière, «une stratégie de dépistage pertinente consisterait en la réalisation d'un dépistage une fois dans la vie dans la population générale, et un dépistage annuel dans les populations à risque». En attendant que les uns et les autres se mettent d'accord, tous conviennent de l'importance des mesures de prévention en direction des toxicomanes par voie intraveineuse, ce qui n'est pas toujours le cas.