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Libération
Patate chaude

Régimes spéciaux : les dirigeants de la SNCF et de la RATP priés de faire rouler la réforme

Jean-Pierre Farandou et Catherine Guillouard ont été reçus par le secrétaire d'Etat aux Transports, qui leur a remis une feuille de route aussi «simple» qu'épineuse : négocier avec les syndicats la mise en œuvre de la fin des régimes spéciaux.
Des cheminots à Strasbourg regardant le discours d'Edouard Philippe sur les réformes, mardi. (VINCENT KESSLER/Photo Vincent Kessler. Reuters)
publié le 11 décembre 2019 à 18h49

Le Premier ministre compte sur eux pour faire le plus dur : «Dès aujourd'hui, je souhaite que les présidents des entreprises publiques engagent le dialogue avec des organisations syndicales.» Une heure plus tard, Jean-Pierre Farandou, le président de la SNCF, et sa collègue Catherine Guillouard de la RATP étaient dans le bureau du secrétaire d'Etat aux Transports, Jean-Baptiste Djebarri, pour un briefing plutôt directif. Il leur appartient de gérer avec le moins de casse possible la fin du régime spécial de retraites dans leur maison, le nombre de salariés concernés et la délicate question des agents qui passeront de l'ancien au nouveau système en ayant cotisé à deux régimes différents. Dès ce jeudi, les quatre organisations syndicales représentatives de la SNCF (CGT, Unsa, CFDT, SUD rail) sont attendues par la direction pour une discussion.

«Philippe ne veut pas discuter avec les grévistes»

Le gouvernement, confronté à une grève des transports particulièrement suivie et qui entre dans son huitième jour, espère voir le mouvement retomber ne serait-ce que ce week-end, avant la nouvelle mobilisation prévue mardi 17 décembre. Est-ce pour éviter de braquer les syndicats qu'Edouard Philippe est resté assez flou sur la manière dont il serait mis fin aux régimes spéciaux et les éventuelles mesures d'accompagnement ? Ce sont en tout cas les patrons de la SNCF et de la RATP qui se retrouvent maintenant en première ligne pour la sortie de crise. Et l'affaire ne se présente pas de la manière la plus simple. «Le silence du Premier ministre sur les régimes spéciaux, ça signifie tout simplement qu'il ne veut pas discuter avec les grévistes», estime Didier Mathis, le secrétaire général de l'Unsa ferroviaire qui entend «ne pas relâcher la pression».

En clair, cette organisation bien représentée chez les cadres et les conducteurs de trains appelle à une reconduction de la grève jusqu'au mardi 17 décembre. Or le gouvernement comptait sur l'Unsa et la CFDT pour une reprise progressive de l'activité dans les transports. Un cadre dirigeant de la SNCF, joint par Libération, n'est guère optimiste pour les jours à venir : «Tout dépendra de l'attitude de l'Unsa et de la CFDT, mais reconnaissons que rien n'a été fait pour les séduire.»

Farandou, nouveau patron en première ligne

La partie s'avère particulièrement délicate pour le nouveau patron de la SNCF, Jean-Pierre Farandou, en poste depuis moins de six semaines. Il doit prendre ses marques, tenter d'instaurer un climat de confiance avec les représentants des salariés et gérer la fin du statut des cheminots, à partir du 1er janvier, ce qui est, en soi, un sujet aussi complexe techniquement que sensible socialement. S'y ajoutent, maintenant, le conflit social actuel et la désagréable impression, pour la direction de la SNCF, de s'être fait refiler la patate chaude. D'autant que l'arrêt de travail qui a commencé le 5 décembre met la filiale transport de marchandises, structurellement déficitaire dans une situation délicate. Elle a déjà été recapitalisée à hauteur de 170 millions d'euros pour lui permettre de tenir sur la durée. Or, à ce rythme, elle risque fort de consommer ses réserves plus tôt que prévu et devenir une bombe sociale à retardement. Un vrai baptême du feu pour le nouveau boss de la SNCF, sans le moindre jour d'état de grâce habituellement accordé à tout nouveau dirigeant.