Les images, insoutenables, ont suscité plus d'une centaine d'alertes, vendredi soir, auprès des policiers et des gendarmes – notamment via la plateforme de signalements Pharos. La vidéo en question, partagée sur Snapchat et Twitter, montre le viol d'une adolescente de 16 ans, par deux garçons du même âge, dans une cage d'escalier à Morsang-sur-Orge (Essonne). Les faits ont eu lieu jeudi dernier. Dimanche soir, les deux mineurs ont été mis en examen pour «viol en réunion», «enregistrement et diffusion d'images violentes et dégradantes». Puis placés en détention provisoire.
Peu après le relais massif de ces images sur les réseaux sociaux, et l'emballement qu'elles ont suscité, un premier suspect s'est rendu, accompagné de proches, au commissariat de Juvisy-sur-Orge. Quelques heures plus tard, dans la nuit de vendredi à samedi, le deuxième suspect est venu à son tour se présenter à la police avec un membre de sa famille, selon une source proche de l'enquête. Ils sont originaires de Morsang-sur-Orge tandis que la victime habite dans la ville voisine de Grigny. Aucun n'a de casier judiciaire. Tous deux ont, en revanche, déjà fait l'objet d'un rappel à la loi «pour des faits qui n'ont rien à voir avec la gravité de ceux qui nous occupent aujourd'hui», précise le parquet d'Evry. L'adolescente est venue déposer plainte, samedi, dans le même poste de police.
3 100 signalements par semaine en 2018 sur la plateforme Pharos
Vendredi, dès 21h30, la police nationale demandait aux internautes sur son compte Twitter de ne pas relayer cette vidéo «d'un acte sexuel qui semble se produire sous la contrainte et la menace». «Le bon comportement face à ce genre de contenus, c'est de signaler mais pas de repartager», rappelle une source proche de l'enquête. D'abord parce que le partage vient régénérer un flux, et donc compliquer davantage la suppression des images. Mais aussi parce que les événements peuvent vite prendre la tournure d'une chasse à l'homme. En effet, en réaction au tweet de la police, on peut lire ces messages, postés par d'apprentis «justiciers» 2.0 : «Ils sont de Morsang-sur-Orge du nom d'*** et **** il suffit de suivre Snap.» Ou encore : «Ils sont déjà identifiés. Suffit juste d'aller les péter chez eux demain matin.»
De fait, des internautes ayant identifié les suspects n'ont pas hésité à balancer directement en ligne leurs noms, numéros, adresses, et parfois même des photos. A l'instar de «Kobz», un hacker assurant être à l'origine de la divulgation de l'identité d'un des deux mineurs. «Ce qui m'intéresse, c'est d'aider les victimes. La justice prend trop de temps dans ce genre d'affaire», a expliqué ce lycéen dans un entretien au Parisien pour justifier sa pratique, illégale. Toujours selon le quotidien, ce sont des habitants du quartier où vivent les suspects qui auraient convaincu leurs parents de les amener au commissariat. En 2018, pas moins de 3 100 signalements pour des contenus illicites ont été faits chaque semaine sur la plateforme Pharos, lancée il y a dix ans. Parmi eux, 12% concernaient des atteintes aux mineurs - relevant, pour la plupart, de la pédocriminalité.