Elle riposte sans trêve. La demande d'audition à l'Assemblée nationale sur son bilan d'ambassadrice des pôles ? Ségolène Royal se dit «toute disposée» à s'y rendre puisque, ironise-t-elle, «des députés s'intéressent enfin à ce sujet si important pour le climat». Sans être «dupe des arrière-pensées politiciennes» ni se priver de dénoncer une «opération de communication» lancée pendant les fêtes. Elle note d'ailleurs qu'elle n'a pour l'heure «reçu aucune "convocation"», l'Assemblée nationale suspendant ses travaux durant les vacances de Noël. Et de s'interroger sur l'opportunité de lancer maintenant cette offensive.
Absences
C'est mardi que deux députés ont fait savoir au Figaro leur intention de demander des comptes à Ségolène Royal. En tant que corapporteurs d'une mission d'information «sur la problématique des pôles : Arctique et Antarctique» - preuve que le Parlement se penche sur cet enjeu -, Christophe Naegelen (UDI) et Eric Girardin (LREM) souhaitent notamment entendre ses explications sur «son absence à l'ensemble des réunions officielles au Conseil de l'Arctique qui se sont tenues depuis sa nomination» par Emmanuel Macron, en juillet 2017. Le chef de file des députés UDI-Agir, Jean-Christophe Lagarde, a rebondi, demandant que Ségolène Royal soit «en parallèle» auditionnée par la commission des affaires étrangères, le Quai d'Orsay ayant la charge de ces ambassadeurs thématiques. Si la convocation était adressée par cette commission - ou conjointement avec la commission du développement durable -, celle-ci serait ainsi obligatoire.
La polémique court depuis plusieurs semaines, avec les révélations de France Info et de l'hebdomadaire le Point sur l'activité de la successeure de Michel Rocard en charge de la négociation internationale pour l'Arctique et l'Antarctique. Si son poste n'est pas rémunéré, Royal dispose de trois collaborateurs et d'une enveloppe de frais de mission octroyés par le ministère des Affaires étrangères. Or ces enquêtes ont pointé l'utilisation de ces moyens, à plusieurs reprises, pour la promotion de ses activités personnelles - la sortie de son livre ou des missions liées à sa fondation, Désirs d'avenir pour la planète. D'autres médias, dont Libération et l'émission Quotidien, avaient, eux, à la rentrée, obtenu la confirmation de l'absence de Ségolène Royal aux quatre dernières réunions du Conseil de l'Arctique, un forum intergouvernemental où la France a un statut d'observateur. Paris y est bien représenté, mais pas par Royal qui «décide de ses déplacements en fonction de ses engagements et de son empreinte carbone», avait répondu son cabinet à CheckNews, transmettant la liste de ses autres voyages à l'étranger dans le cadre de sa mission. Jeudi, Royal a rappelé auprès de l'AFP qu'elle ne se rendait pas à ces réunions «par décision conjointe avec l'ambassadeur sur place, car la France n'en est pas membre et n'a pas la parole. Economisons donc les frais inutiles».
Arène
Quant au mélange des genres évoqué dans l'enquête de France Info, l'intéressée affirme qu'il est «impossible d'utiliser une ligne budgétaire ministérielle» à sa guise. L'ancienne ministre de l'Environnement avait déjà assuré en novembre, sur RMC, que «les activités bénévoles et associatives de [ses] proches ont lieu exclusivement sur leur temps libre». Elle relevait également que ces «insinuations calomnieuses» survenaient, «comme par hasard, au moment où [elle] appar [aissait] dans les sondages la mieux placée pour relever le défi de la gauche» en 2022. Un rendez-vous électoral auquel elle n'exclut pas de participer.
Depuis qu'elle laisse planer le doute sur ses intentions de revenez-y présidentiel, Ségolène Royal, plutôt bienveillante à l'égard d'Emmanuel Macron en début de quinquennat, n'hésite plus à redescendre dans l'arène politique. C'est davantage l'opposante qui s'exprime ces derniers temps, lorsqu'elle fustige le bilan écologique du gouvernement qui donne les manettes à Bercy, dénonce des «réformes tous azimuts dont les Français ne comprennent plus la cohérence» et s'en prend en particulier à la «brutalité» de la réforme des retraites, dont elle exige l'abandon.
C'est pourquoi la candidate socialiste à la présidentielle de 2007 croit voir des représailles dans cette demande d'audition à l'Assemblée nationale. «Ils ne savent plus quoi inventer pour me faire taire, parce que toute parole de vérité qui dénonce les graves désordres sociaux dont la France souffre les dérange», a-t-elle contre-attaqué jeudi. Jean-Christophe Lagarde, qui fait valoir la mission de contrôle de l'action du gouvernement par le Parlement, réplique, lui, que Royal, quand elle commente la politique intérieure, sort du devoir de réserve que lui impose sa fonction. Les deux députés membres de la mission parlementaire sur les pôles ont d'ailleurs expliqué vouloir aussi interroger Ségolène Royal sur «ses interventions médiatiques quasiment hebdomadaires sur la politique nationale». Ils pourraient lui adresser sa convocation dans les prochains jours.