Ils ont mis du temps, beaucoup de temps avant de se décider à dire que «la coupe [était] pleine». Et de s'engager dès lors dans un mouvement de révolte unique, où l'on a retrouvé à l'unisson toutes les composantes du personnel hospitalier, de l'aide-soignant au chef de service.
D’abord, en début d’année, ce furent les petites mains de quelques hôpitaux psychiatriques, en particulier dans le nord de la France, qui ont arrêté le travail, estimant maltraiter leurs malades. Puis, au printemps, dans quelques services d’urgences d’hôpitaux parisiens, des infirmiers et des aides-soignants ont lancé un premier collectif, ne supportant plus la baisse des effectifs en même temps que la hausse de leur activité, et finalement plus de 300 services ont arrêté le travail. Les médecins, comme à leur habitude, ont regardé. Professionnels individualistes, peu engagés dans des mouvements collectifs, ils se sont montrés certes attentifs, mais passifs. Il a fallu l’émergence de quelques personnalités, mais aussi le constat que, confrontés à des prises en charge dangereuses, ils travaillaient mal, pour qu’ils sortent dans la rue. Et manifestent le 14 novembre, eux, l’aristocratie hospitalière, médecins aux statuts privilégiés, devenant alors les premiers de cordée d’un mouvement devenu «hospitalier».