Attention, un Wauquiez peut (peut-être) en cacher un autre. Le 2 juin, voix tremblante et mine défaite, l'ancien ministre annonçait quitter ses fonctions de président des Républicains à cause du crash de son parti aux élections européennes (8,5% des suffrages, loin derrière le RN, LREM et EE-LV). «Les victoires sont collectives, les défaites sont solitaires et il faut que je prenne mes responsabilités», déclarait-il sur le plateau de TF1. En décembre, le Figaro allait même jusqu'à classer le président de la région Auvergne-Rhône-Alpes dans la catégorie peu flatteuse des «politiques que 2019 a engloutis».
Pourtant, ces six derniers mois, le héraut des «racines» de la France semble s'être refait une santé au contact de son terroir, de l'unique responsabilité qui lui reste : la gestion de la région. Mercredi, il a gratifié la presse, avant même les traditionnels vœux, d'une conférence de dernière minute consacrée officiellement à «l'indemnisation des usagers TER touchés par le mouvement de grève de la SNCF». De quoi prendre le pouls de l'homme en pleine (petite) traversée du désert.
«Je ne m’exprime pas sur les sujets nationaux»
Déjà, la joue glabre du temps du sacre de la droite dure a fait place à une barbe de trois jours très Paris-Dakar. Ensuite, l'homme semble reposé. Prenant toujours un plaisir visible à s'entourer d'objectifs et de micros mais restant concentré sur sa mission : ses seuls administrés – ici, en l'occurrence, les usagers du TER (80 000 abonnés dans la collectivité, qui verse chaque année 510 millions d'euros à la SNCF). «Notre responsabilité, c'est de se placer de leur côté, explique-t-il. Je ne peux pas accepter que ce soit la double pleine pour eux.» Comprendre : payer un abonnement de train qui ne sert à rien et devoir se payer un plein d'essence pour parvenir à circuler.
Laurent Wauquiez après sa conférence de presse.
Photo Bruno Amsellem pour
Libération
S'ensuit l'habituelle dédicace aux élites parisiennes, déclinée à la sauce du jour : «On parle du passe Navigo, de la RATP, du RER, on oublie tous ceux qui sont en région. Bien sûr que l'Ile-de-France a été très impactée (sic), mais nous aussi.» Depuis le 5 décembre, moins d'un train sur cinq en moyenne a circulé chaque jour en Auvergne-Rhône-Alpes. «On s'est battu très tôt pour faire indemniser les usagers, on a demandé le remboursement intégral des abonnements de TER, explique Laurent Wauquiez. Et je suis en mesure aujourd'hui de vous annoncer que nous l'avons emporté.» En politique, il n'y a pas de petite victoire. «On reste extrêmement préoccupés par le poids de la grève», ajoute le président de région.
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Justement, on tente une question sur les négociations actuelles et la mobilisation conte la réforme des retraites. Sourire même pas crispé de l'intéressé : «Je me suis astreint à un devoir de réserve, je ne m'exprime pas sur les sujets nationaux.» Sage incartade, quelques minutes plus tard : «Qu'il y ait des grèves et des manifs, ça fait partie de la liberté d'expression.» En avril, avant même qu'il ne quitte LR, un sondage donnait Laurent Wauquiez largement réélu à la tête d'Auvergne-Rhône-Alpes en 2021. Pour retrouver la gagne, il faut savoir s'entourer. Lors de la dernière assemblée plénière de décembre, le président de région s'est doté d'un nouveau conseiller spécial en vue de cette échéance. Un petit jeune au poil, nommé Brice Hortefeux.