Ça se corse… Des manifestations moindres mais imposantes, des taux d'arrêt de travail en baisse mais toujours forts, des transports toujours perturbés. Le plus long mouvement de grève de ces dernières décennies menace de s'allonger encore. On en vient à se demander si le gouvernement n'a pas choisi une posture franchement irresponsable. Non seulement il oppose un «niet» sonore aux syndicats qui demandent le retrait du projet, mais il envoie aux pelotes la CFDT, qui accepte le principe de la réforme mais demande l'abandon de «l'âge pivot». Tout peut encore changer demain, lors de la énième séance de négociations. Mais on n'en prend pas le chemin. La position gouvernementale a quelque chose d'incompréhensible. Bonne pâte malgré ses sourcils froncés, Laurent Berger a proposé de débattre de l'équilibre du système lors d'une «conférence de financement». Le gouvernement promet de son côté de laisser aux partenaires sociaux le soin de gérer le futur dispositif. Qu'est-ce qui l'empêche, dans ces conditions, de laisser tomber le chiffon rouge de l'âge pivot pour trouver ensuite, dans la concertation, les moyens d'assurer l'équilibre des retraites ? A moins qu'il n'y ait à ce mystère une explication plus politique. Petit signe éloquent, le Point, organe de la droite libérale, titre perfidement, en parlant d'Emmanuel Macron : «S'est-il dégonflé ?» Telle est la hantise de la droite de la majorité : ouvrir un boulevard aux responsables LR qui fustigent un projet byzantin et dangereusement coûteux à leurs yeux. Si rien ne change, le scénario noir est déjà écrit : la grève se poursuit en terre inconnue, le gouvernement reste impavide. S'il obtient le KO final, il aura rejeté dans l'humiliation l'ensemble du syndicalisme français. Et s'il perd, il terminera le quinquennat dans les cordes, incapable de réformer plus avant.
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