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Alimentation

Des cantines pour mettre du beurre dans les épinards des agriculteurs

Le marché du bio local et de saison dans la restauration collective peut être un coup de pouce bienvenu pour cette profession sinistrée.
Un agriculteur présente une botte de ses carottes biologiques dans son champs à Pérenchies, en 2015. (PHILIPPE HUGUEN/Photo Philippe Huguen. AFP)
publié le 13 janvier 2020 à 20h31

L'arrivée du bio dans les cantines, et surtout du local de saison, est une bonne nouvelle pour les agriculteurs, qui en ont peu. En 2017, 14 % d'entre eux déclaraient un revenu négatif et 25 % gagnaient moins de 7 600 euros par an, d'après une étude de la Commission des comptes de l'agriculture de la nation. Dans ce contexte, les syndicats agricoles, la majoritaire FNSEA comme la Confédération paysanne, applaudissent l'évolution. «J'espère que ce sera un sujet primordial dans la campagne pour les élections municipales, dit Aurélien Clavel, agriculteur dans l'Isère et vice-président du syndicat Jeunes Agriculteurs. On ne devrait pas choisir de faire des économies sur le contenu des assiettes de nos enfants. Leur santé en dépend.»

La question du coût est souvent décisive dans le choix des fournisseurs pour les restaurants scolaires. Or acheter chez l'agriculteur du coin coûte souvent plus cher que de miser sur des produits importés et vendus par des grands distributeurs. Malgré ces freins, et pour renforcer l'économie locale, de plus en plus de communes décident de conclure des contrats directement avec des producteurs voisins. Bémol : la complexité des appels d'offres écarte la plupart des petits producteurs, qui n'ont ni le temps et ni les connaissances techniques pour candidater. Le risque est gros : le producteur s'expose à des pénalités en cas de dysfonctionnement. «Surtout en bio, où la production est plus sensible aux aléas climatiques, il est difficile de garantir son approvisionnement en termes de quantité comme sur la durée, abonde Aurélien Clavel, lui-même producteur, entre autres, de noix et d'orge bio. Les filières ont intérêt à se structurer autour de regroupements d'agriculteurs.»

Dans son département d’Auvergne-Rhône-Alpes, la légumerie Isère à saisonner a été fondée spécialement pour centraliser la production des maraîchers de la région, transformer les légumes et alimenter les cantines iséroises. De même, en Seine-Maritime, l’association Local  & Facile, lancée en 2010, propose 7 000 repas par jour aux restaurants collectifs du coin, à base de légumes, fruits, produits laitiers, œufs et viande de la région.

Plutôt que de laisser la main aux agriculteurs, certains maires décident de prendre les devants. A Mouans-Sartoux, dans les Alpes-Maritimes, «nous produisons, depuis 2011, les légumes de notre cantine», expliquait Gilles Pérole, maire adjoint de la commune, lors d'une table ronde sur le sujet organisée au Sénat mi-décembre : «Sur 6 hectares, nous avons salarié 3 agriculteurs […] qui produisent 27 tonnes de légumes et 95 % de nos besoins, sachant qu'on fait 1 300 repas par jour sur la commune.» La FNSEA chiffre à 28,8 milliards d'euros par an le potentiel de débouchés pour l'agriculture française.