Menu
Libération
Retraites

Manif à Paris ce mardi : «une petite sortie» avant jeudi

Un petit millier de personnes étaient réunies contre le projet de réforme des retraites. L'intersyndicale mise sur ce jeudi 16 janvier pour mobiliser massivement, alors que la majorité des Français soutiennent toujours le mouvement.
Dans le cortège parisien mardi. (Lucile BOIRON/Photo Lucile Boiron pour Libération)
publié le 14 janvier 2020 à 16h22

A une heure du début de la manifestation contre la réforme des retraites à Paris, Yann (1), un gréviste de la RATP, secoue sa caisse de grève devant une supérette. Parmi les clients qui sortent du magasin, quelques-uns glissent une pièce ou un billet. D'autres adressent un sourire et une tape dans l'épaule. Une femme, sac cabas dans la main, sort en furie en direction de l'agent, puis vocifère : «Vous n'avez pas fini de nous faire chier ?» S'ensuit un débat de plusieurs minutes, où les mots «privilégiés», «profiteurs» et «emmerdeurs» sont prononcés à maintes reprises. En aparté, Yann craint une chose : que le retrait provisoire de l'âge pivot crée de nouvelles tensions entre les grévistes, épuisés, et les autres, favorables à la réforme.

Pour afficher la détermination des opposants au projet, l'intersyndicale a convié, ce mardi, les grévistes parisiens à renouveler des actions locales dans toute la France. A Paris, une manifestation est prévue pour «soutenir les grévistes en reconductible», affirme-t-on dans les rangs de FO. Mais ce mardi, peu de monde a répondu présent à l'appel des syndicats – environ 1 000 personnes soit peu ou prou la même jauge que le 19 décembre, où les manifestants étaient déjà appelés à participer à des actions locales. Quelques gilets jaunes, quelques profs, des agents RATP et quatre ballons de syndicats gonflés tout au plus. Yves Veyrier et Philippe Martinez, les secrétaires généraux de FO et de la CGT, n'ont même pas prévu de défiler ce jour. «Ils ont du travail», glisse un dirigeant du premier syndicat interrogé. Seul Benoit Teste, tout nouveau secrétaire général de la FSU, a fait le déplacement. Il reconnaît un peu gêné que la mobilisation baisse et que «le taux de grève est plus bas aujourd'hui, y compris dans l'éducation».

Une journée d’action de trop ?

«L'interprofessionnelle a essayé d'appeler à trois jours de manifestation rapprochées [les 14, 15 et 16 janvier, ndlr], la FSU a poussé pour qu'il y ait cette journée. Mais force est de constater que, de ce que nos collègues nous disent, ça ne s'élargit pas assez, donc ça décourage certains», analyse-t-il. De quoi parler d'essoufflement ? «Non, je pense qu'avec trois journées d'action rapprochées, on a eu les yeux plus gros que le ventre», reconnaît le syndicaliste, qui préfère évoquer une «deuxième étape» dans la mobilisation.

«Après quarante jours de grève, on peut comprendre que certains réfléchissent à y retourner, surtout les agents d'exécution qui gagnent 1 500 euros par mois. Pour certains, la fiche de paie de janvier va être compliquée à vivre», appuie de son côté Laurent, cadre grands travaux à la SNCF en Normandie, syndiqué Sud-Rail. Selon lui, tout n'est pas perdu pour autant, car «la détermination est toujours là, d'ailleurs les bases de l'Unsa et de la CFDT ne sont pas d'accord avec leur syndicat» et «l'opinion publique est toujours opposée au projet de réforme». Idem pour Sophie, 25 ans, professeure des écoles à Gagny (Seine-Saint-Denis) qui reconnaît se sentir «méprisée et un peu découragée», mais pour qui «aller en manif met du baume au cœur».

Les Français toujours en soutien

Pour les centrales, la faible affluence ce mardi ne signifie pas forcément que les grévistes ont lâché l'affaire. «Est-ce qu'on a l'air inquiets ?» interroge un cadre de FO. «C'est une petite sortie, c'est tout», s'amuse-t-il. Selon un récent sondage Harris Interactive pour RTL, 60% des Français soutenaient encore la mobilisation ce lundi. Mais l'intersyndicale, qui a appelé à faire du 16 janvier «une journée de mobilisation massive interprofessionnelle», doit désormais mobiliser de manière conséquente ce jeudi dans les rues de Paris et des grandes villes de province. Sans quoi on pourrait bien parler d'essoufflement.