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Libération

Le tramadol, opioïde antidouleur bientôt sous surveillance

publié le 16 janvier 2020 à 20h21

A compter du 15 avril, le tramadol, un antalgique de la famille des opioïdes, ne pourra plus être prescrit pour une durée supérieure à trois mois, contre un an auparavant. Façon pour l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) de tirer toutes les conséquences du rapport qu’elle a publié en février sur la consommation dans l’Hexagone de ce type de médicament, à l’origine d’une crise sanitaire dévastatrice aux Etats-Unis.

Les prescriptions de ces antalgiques opioïdes sont en augmentation constante depuis quinze ans en France. Dérivées de l’opium, ces molécules synthétiques permettent de prendre en charge certaines douleurs aiguës et chroniques, notamment dans le traitement du cancer : puissantes et efficaces, elles activent les récepteurs morphiniques du cerveau et atténuent la souffrance.

Mais leur puissance addictive est supérieure à celle de l'héroïne. Ils exposent donc à un risque de dépendance, de surdosage et de dépression respiratoire pouvant conduire à la mort. La France a observé la progression de ces effets pervers ces dernières années : le nombre d'hospitalisations liées à la consommation de médicaments opioïdes a presque triplé entre 2000 et 2017, et il y a eu «au moins 4 morts par semaine», selon l'ANSM, entre 2000 et 2015.

La faute à l'ignorance de certains praticiens : «Il y a encore des médecins et des pharmaciens qui ne savent pas que le tramadol est un opioïde, déplore Nathalie Richard, directrice adjointe des médicaments antalgiques et des stupéfiants de l'ANSM. Ce n'est pas le plus puissant, mais les risques de dépendance sont les mêmes quel que soit l'opioïde.» La faute aussi à un mésusage croissant. On observe, en cas d'arrêt, des syndromes de manque même sans dépassement des doses recommandées et sur une courte période. Jusqu'à inciter les patients à continuer d'en prendre même si leur douleur a disparu.

D’où le holà de l’ANSM. Au-delà de trois mois, la poursuite du traitement par tramadol (voie orale), seul ou associé à d’autres molécules (comme le paracétamol), nécessitera une nouvelle ordonnance, précise l’agence sanitaire.