Menu
Libération
Analyse

Quand le maintien de l’ordre tord le bras aux droits

Article réservé aux abonnés
Longtemps vantée par les autorités, la gestion «à la française» des manifestations empiète au fil des années sur les libertés publiques.
En 2010 à Lyon, quelque 700 manifestants se sont retrouvés «nassés» par les forces de l’ordre. (Photo Philippe Desmazes. AFP)
publié le 5 février 2020 à 20h21

C'est une répression qui vient de loin. Au-delà de l'utilisation sans précédent d'armes comme les lanceurs de balles de défense et différentes grenades explosives, la gestion habituelle de la protestation, du mouvement des gilets jaunes aux manifestations contre la réforme des retraites, a été largement critiquée ces derniers mois. Une situation permise par l'empilement de mesures sécuritaires et le développement de techniques de gestion policière des foules de plus en plus liberticides. «Cela fait plus de dix ans que le droit de manifester est sérieusement grignoté en France», analyse la sociologue et spécialiste des conflits sociaux Isabelle Sommier.

Ce mouvement s'explique notamment par une volonté croissante des autorités d'empêcher la moindre dégradation ou violence dans les rassemblements, puis de judiciariser le plus possible ces événements - et donc d'interpeller des manifestants. Cette capacité juridique d'arrestation a été facilitée récemment par la création d'un délit de dissimulation du visage dans la loi dite «anticasseurs», adoptée en avril. Avant ce texte, les forces de l'ordre n'étaient pas pour autant désarmées. Lors du mouvement des gilets jaunes, pour la seule journée du 8 décembre 2018, plus de 1 700 personnes avaient été placées en garde à vue. Les parquets avaie