Mardi : deux femmes tapotent sur leur ordinateur à l’intérieur du QG de Karim Bouamrane. Les photos du candidat socialiste à Saint-Ouen sont partout. On entre sans frapper, la tête d’affiche est absente. Elles font le boulot. La première, une avocate, parle de l’épopée actuelle avec une belle voix.
«Karim»
a un
«super»
état d’esprit et il est
«toujours souriant».
Elle souligne aussi les
«belles rencontres»
avec les
«anonymes»
qui passent une tête pour filer un coup de pouce. La seconde, membre d’EE-LV, explique que son parti s’est rangé derrière
«Karim»
en douceur. Elle ajoute :
«C’est un enfant de Saint-Ouen, il est né ici. Franchement, il le mérite.»
La situation locale est ouverte pour le socialiste : le maire sortant, William Delannoy (UDI), avance à contre-courant, La République en marche a du mal à se faire entendre alors que les insoumis et les communistes ont réussi à se diviser en trois listes. Il y a quelques semaines, au Parti socialiste, la ville de Saint-Ouen ne figurait pas dans la liste des «victoires potentielles». Aujourd'hui, c'est tout l'inverse.
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La montée de Karim Bouamrane fait causer, forcément. Une jeune insoumise souffle que le quadragénaire est élu depuis le siècle dernier. Et qu'il a eu des responsabilités au Parti socialiste pendant que Manuel Valls logeait à Matignon. «Personne n'a aimé ce PS et personne n'a oublié, surtout dans les coins populaires», tonne-t-elle. Une militante communiste prévient : «Karim joue sur la proximité avec les quartiers, l'enfant du pays qui veut prendre la ville mais il a déjà essayé lors de la dernière municipale et il a raté son coup.» Les insoumis et communistes partent divisés mais ils espèrent bien se regrouper entre les deux tours pour prendre la ville.
Karim Bouamrane s'installe à l'heure du déjeuner au Ripailleur, un restaurant tout près de son QG. Il a l'air à l'aise. Le socialiste revient sur son parcours. De sa naissance dans le coin à ses premiers pas en politique. Il avait à peine 22 ans. Le candidat a débuté avec les communistes, avant d'atterrir chez les socialistes. Le père de trois enfants a passé de nombreuses années à l'ombre des éléphants, dont Jean-Christophe Cambadélis. Il tente de nous expliquer que son heure est venue : «Pourquoi on doit toujours compter sur les autres ? Oui je suis né ici, et je peux prendre le pouvoir.»
Le socialiste fait un pas dans le passé. En 2014, lors des dernières municipales, il ne s'imaginait pas derrière le grand bureau de la mairie. «Cette fois, je suis prêt et je ne veux pas prendre la ville pour battre la droite mais pour la transformer», dit-il. Le candidat reçoit de nombreux appels des gradés socialistes. Il se marre : «Ils sentent l'odeur du barbecue donc ils se rapprochent.» Il ne doit pas oublier que la politique est un sport dangereux où l'on peut très vite se cramer.