Menu
Libération
Analyse

La droite de nouveau en vague ?

Fort de sa victoire de 2014, le parti Les Républicains aborde avec sérénité le scrutin de mars, qui avantage souvent les maires sortants. Mais certains cadres craignent un excès de confiance.
A droite, Christian Jacob, président de LR. A sa droite en arrière-plan, Aurélien Pradié, secrétaire général du parti. (Photo Julien Muguet. Hans Lucas)
publié le 11 février 2020 à 20h31

Cette fois, le pire n'est pas sûr. Trois ans de macronisme et d'échecs électoraux ont imprimé chez Les Républicains une modestie de bon aloi, voire un élégant scepticisme quant à l'avenir du parti. Mais à moins de cinq semaines des municipales, serait-il enfin permis d'y croire ? «C'est quand même la seule élection où être sortant est un atout», chantent à l'unisson les cadres du parti. «Si tu es sortant et pas trop mauvais, tu peux écrire "McDonald's" ou "Tasse à café" sur ton affiche, ça passe», estime un député.

Et des sortants, la droite en a à revendre, forte de la «vague bleue» des municipales de 2014. Conservant ses trophées marseillais, niçois et bordelais, elle y avait ajouté de nombreuses villes grandes et moyennes, comme Toulouse, Reims, Limoges ou Saint-Etienne. Avec le centre, la droite dirige aujourd'hui plus de 60 % des communes de plus de 9 000 habitants. A lui seul, le parti Les Républicains en tient un petit tiers. Le moral des troupes est aussi entretenu par la bonne campagne parisienne de Rachida Dati : certes pas favorite, celle-ci peut au moins espérer figurer honorablement dans un scrutin que certains au sein du parti disaient perdu d'avance.

«Un peu préoccupé»

La concurrence, juge-t-on chez LR, ne serait pas en situation de lui disputer le morceau. Ni une gauche mal remise de ses propres échecs ; ni un Rassemblement national traditionnellement faible à cet échelon (même si le moindre gain de sa part ferait événement) ; ni, croit-on enfin, La République en marche. Mal implanté, le parti présidentiel a souvent renoncé à des candidatures autonomes pour soutenir des sortants, majoritairement issus de la droite et parfois, comme à Nice et Toulouse, encartés chez LR. Seule inconnue : l'ampleur d'un vote écolo qui pourrait faire passer plusieurs villes moyennes au vert. «Deux ou trois cas du genre masqueraient le fait que la droite reste assez haut», redoute un maire francilien.

Si la droite maintient ses positions, elle abordera en confiance le prochain renouvellement partiel du Sénat, en septembre, et les scrutins régionaux et départementaux de 2021. De quoi continuer de se poser, jusqu'à la fin du quinquennat, en digne représentante des «territoires», terme aussi imprécis que valorisant, qu'elle oppose depuis trois ans à un Macron jugé «déconnecté» des réalités locales. Un succès, enfin, serait le premier acquis électoral de la nouvelle équipe dirigeante de LR, présidé depuis octobre par Christian Jacob.

Gare à l'excès de confiance, préviennent pourtant quelques Cassandre. «Je suis un peu préoccupé par cette musique d'ambiance qui dit que tout va bien se passer, témoigne une figure de LR. Dans notre plus grande ville, Marseille, on a tous les ingrédients pour perdre car on se présente divisés. Si on perd là, cela masquera tout ce qu'on conservera ailleurs.» Donnée favorite, la candidate LR Martine Vassal est en effet confrontée à la dissidence du sénateur Bruno Gilles à Marseille. Le parti multiplie, sans succès, les tentatives de rapprocher les deux listes de droite.

«Oxygène artificiel»

D'autres veulent prévenir leur camp… des périls de la victoire, les succès locaux n'étant pas forcément prédictifs d'un regain national. «Un bon résultat sera comme une bouffée d'oxygène artificiel, redoute un élu. Après quoi tout le monde va se faire plaisir pendant deux ans en fantasmant la candidature Baroin.» Même avertissement chez un parlementaire : «La victoire municipale sera liée à des personnalités, pas à notre discours national. Si l'on assimile la présidentielle à une cantonale, on passera à côté de beaucoup de choses.»