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Libération
Témoignage

Anaïs, 33 ans, infirmière au CHU de Nice : «Je me dis que je vais mourir au travail»

Anaïs, 33 ans, infirmière (DR)
par Mathilde Frénois, à Nice
publié le 16 février 2020 à 21h01

«C'est sur Facebook que je suis les actualités sur la réforme des retraites. Je suis tombée sur un dessin où on voyait une vieille infirmière en train de soigner une petite jeune. L'infirmière lui demande : «Vous faites quoi dans la vie ?» La jeune répond qu'elle cherche du travail. Je me suis reconnue dans cette petite vieille. Comme elle, je me dis que je vais mourir au travail. Je suis infirmière depuis 2017. C'est quand je suis rentrée aux pompiers volontaires que j'ai compris qu'il fallait que je devienne infirmière. J'aime prendre soin des gens. C'est un boulot physique, qui n'est pas reconnu comme tel, mais je ne me verrai jamais quitter l'hôpital public. Je travaille en infectiologie. Dans mon équipe, on est 90 % de femmes. La plus âgée a 60 ans. Elle a un poste aménagé : elle est coordinatrice et fait de l'administration. Elle part bientôt à la retraite, son poste ne sera sûrement pas remplacé. Moi, je suis de 1986, donc je vais travailler jusqu'à 64 ans. Je ne sais pas si à 64 ans, on est encore en capacité de pousser un lit, de faire des prises de sang plié en deux et de changer des pansements. Ça m'angoisse. Quand tu as travaillé pendant quarante ans, tu as envie d'avoir une vie décente. Mais comment, avec une pension de 1 000 euros, peut-on payer son loyer, avoir des loisirs et gâter ses petits-enfants ? Je suis très pessimiste : je pense que le gouvernement ne fera pas machine arrière car il n'imagine pas nos conditions de travail.»