On a cru que Cédric Villani était un savant un peu perché, frappé par la lubie soudaine de devenir maire de Paris. On avait juste oublié qu’on ne devient savant qu’en travaillant. Auditionné mardi par Terra Nova et la Fondation pour l’innovation politique (Fondapol), à l’instar des autres candidats parisiens, le dissident ex-LREM a fait la démonstration de sa maîtrise des dossiers.
Exemple le plus spectaculaire, l'extension de la capitale. Villani est le seul candidat à oser la proposer : «Le grand enjeu pour moi, c'est celui de l'agrandissement de Paris qui s'est arrêté en 1860.» Et de rappeler que «pour résoudre les problèmes de Paris, il faut penser à l'échelle métropolitaine». Pas faux. Mais qu'en pensent les maires des 22 communes limitrophes concernées par son plan d'annexion ? «Ils disent qu'il est hors de question de se mettre sous le joug de Paris, que leurs communes ont leur identité.» Mais dans un second temps, assure-t-il, ils reconnaissent que «c'est quand même le sens de l'histoire». A condition toutefois «que le statut des maires d'arrondissement évolue». Pile ce qu'il prévoit dans son programme. Et les populations de ces villes, elles en pensent quoi ? «Les gens veulent abolir cette distinction entre Paris et banlieue. On l'a testé en quali : ils se sentent "Grand-Parisiens".»
Le reste de l'audition est à l'avenant. Dans chaque mesure, les spécialistes peuvent reconnaître l'apport des experts et des sachants. Villani veut des «quartiers apaisés». Banal. Mais il les imagine avec des «sens interdits organisés de telle sorte qu'il n'y ait plus les raccourcis que Waze propose». Malin. Sur les transports collectifs, il ne prétend rien faire tout seul. Il faut que «l'Etat, la région et la ville soient alignés». Il affirme que «l'espace public est trop précieux pour être gâché par autant de voitures garées», que l'on a «plein de parkings souterrains sous-utilisés» et que «les parkings-relais aux portes de Paris, ça ne marche pas». Tout ça est vérifié. Il pointe «un exemple à ne pas suivre», à savoir «la réflexion de l'équipe actuelle sur le périphérique». La municipalité reconnaît qu'elle n'a «pas vraiment assez de données pour comprendre comment fonctionne le périphérique», et pourtant elle veut le transformer, s'étonne-t-il. A 10 % dans les sondages, Villani a peu de chances d'appliquer son programme. Mais avec d'autres, qui sait ?