«Depuis le mois d’août, je suis à Paris. Je suis arrivé du Mali, je ne savais pas comment faire, où aller. Alors depuis, je suis à la rue. Vivre comme ça, c’est des journées compliquées, alors je passe beaucoup de temps à la bibliothèque. On reste là-bas pour se mettre au chaud, parce que dehors, en ce moment, il fait froid, y a beaucoup de pluie. La bibliothèque où je vais, à Porte de la Villette, est grande. On y va à plusieurs, les gens de la bibliothèque sont gentils. Y a beaucoup de livres et d’ordinateurs. Moi, je me pose sur les chaises parce que c’est là qu’il y a les chargeurs. Pour aller sur l’ordinateur, il faut s’inscrire avec une pièce d’identité. Mais moi, j’ai mon téléphone et y a du wi-fi gratuit. Je branche mon téléphone et après, soit je lis un livre soit je regarde un film. Un livre, comme ça, n’importe lequel, juste pour m’entraîner. Ou j’écoute de la musique : du rap français ou malien !
«J’y reste longtemps, parfois cinq heures, de 13 heures à 18 heures. Entre les deux repas que je vais récupérer à une association. La bibliothèque, c’est pas la rue, c’est calme, y a de la sécurité. Alors que dehors, là où je dors à Porte d’Aubervilliers, c’est difficile. Je dors pas bien parce que c’est dur, y a du bruit, je pense aux voleurs et à la police. Dans la rue, y a tout, même de la violence. Au moindre bruit, je me réveille. Si c’est pas la bibliothèque, je vais métro Couronnes pour les cours de français ou au jardin pour jouer au foot. Tout ça, c’est pour passer le temps ou me faire plaisir. Tout ça en attendant le juge. J’attends sa réponse pour que ça change, mais je crois qu’il m’a oublié. J’attends un rendez-vous juridique. Tout ça pour montrer que j’ai 17 ans.»