«Les municipales ?» Tom, l'un des six associés du Café citoyen, un bar écologiste, féministe et locavore du centre-ville lillois, pose une tirelire en carton sur le comptoir. Les clients peuvent y glisser des sous pour soutenir l'opposition au projet d'aménagement de l'ancienne gare Saint-Sauveur, défendu par la maire PS, Martine Aubry. La municipalité voudrait transformer la friche en quartier avec espaces verts, piscine olympique et logements, dans une ville qui en manque. Mais le centre-ville manque aussi de nature, rappellent ceux qui souhaitent préserver ces 23 hectares de biodiversité, plan B à l'appui adressé aux candidats au beffroi. Enjeu de l'élection locale, le projet est gelé, après des recours en justice.
Photo Aimée Thirion pour Libération
Ici, le devenir de Saint-Sauveur colle aux préoccupations de plus en plus généralisées sur l'urgence climatique. «Il y a pas mal de pistes cyclables, mais Lille n'est pas une ville très paysagère, glisse Lucie, 29 ans, au comptoir. Il n'y a pas assez de vert, pas d'eau…» Au premier étage, Marine, enseignante de 27 ans, attablée devant une soupe de panais, dit que c'est pour ça qu'elle votera écolo. «Je ne demande pas un Central Park mais quand même… J'ai étudié à Lyon, il y avait plus de monde et plus de parcs», avance cette habituée du café. Un lieu «politisé mais pas partisan», insistent deux autres associées en plein service.
L'endroit brasse des militants et des clients entrés là par hasard. On y collecte des vêtements pour les réfugiés et les sans-abri, on discute des façons de se réapproprier l'espace public, on consomme local et bio… Pour certains, comme Victor, 27 ans, venir ici est aussi politique que de ne pas aller voter au prochain scrutin. Il assume son abstention, fruit d'un ras-le-bol «de toujours choisir le moins pire». Au dernier étage, Morgane, 33 ans, en chaussettes, les jambes étendues sur une banquette, partage sa vision. «On nous parle tout le temps de conscience écologique. J'ai vu les programmes arriver dans ma boîte aux lettres. Je n'y trouve rien. Ce sont juste toujours les mêmes mots clés.»
Photo Aimée Thirion pour Libération
Tous les prétendants à la mairie rivalisent de propositions pour verdir Lille, encourager les mobilités douces et améliorer la qualité de l'air d'une ville régulièrement concernée par les pics de pollution aux particules fines. «C'est de la démagogie, faut montrer qu'on sera meilleurs que les autres, tranche Morgan. Je ne leur fais pas confiance. Dans une élection, le seul but, c'est de rassembler des voix.» A moins d'un mois du premier tour, personne n'a la sienne.