Menu
Libération
Série (5/6)

Une semaine dans les bistrots de Lille : «J’étais pour Martine mais elle devrait passer la main»

Le Loto, à Lille. (Photo Aimée Thirion pour Libération)
publié le 20 février 2020 à 21h11

Au Loto, bar PMU populaire de l'hypercentre lillois, à dix minutes à pied de la gare Lille-Flandres, tous les regards sont tournés vers les écrans de télévision pour parier en temps réel sur les chevaux. «Les municipales, c'est comme le tiercé, s'amuse Emiliano, 58 ans. Des favoris, des outsiders… Faut sentir l'ambiance.» Son pronostic pour Lille ? «Martine Aubry en tête, La France insoumise en deuxième et LREM en troisième !»

Tous les parieurs croisés au Loto misent aussi sur la victoire de la maire socialiste, en lice pour un quatrième mandat. Pour ce premier mardi des vacances scolaires, le bar est moins fréquenté que d'habitude, remarque Yann, le patron. Parmi les fidèles, il y a Kamel, un bonhomme truculent, qui considère, d'une voix forte, que «Martine mérite un dernier combat». «J'ai du respect pour elle mais pas pour son entourage», bougonne le joueur avant de se replonger dans ses paris. «Je n'ai pas encore d'idées mais je vais voter !» résume Jean, 55 ans, lui aussi plus préoccupé par les courses de chevaux que de celle au beffroi. A côté d'un corner PMU, rempli de grilles encore vierges, Boakye, 54 ans, nous invite à le rejoindre d'un signe de la main. «Moi j'aimerais m'intégrer et voter… J'ai un travail, je suis électricien dans le bâtiment. Je vis à Lille depuis 1984 mais je n'ai pas la nationalité française alors je ne peux pas voter.»

A l'intérieur du Loto.

Photo Aimée Thirion pour

Libération

Sa femme, elle choisira Martine Aubry. Ce qu’il approuve. Il se rapproche d’une télé. Trois hommes en bleu de travail entrent commander un café pendant qu’au coin tabac, les clients défilent pour des clopes et des jeux à gratter. La porte s’ouvre et se ferme en permanence.

Au milieu de l'agitation du café, Emiliano fixe son écran, impassible. On tire une chaise en face de lui. «Avant, j'étais pour Martine mais comme beaucoup, je suis pour qu'elle passe la main. J'aurais aimé qu'elle ne se présente pas malgré ce qu'on lui doit au niveau conscience politique sur les 35 heures.» Ce médecin, fils de mineur, garde en mémoire la victoire de Mitterrand comme principal souvenir d'un Parti socialiste dans lequel il s'est longtemps reconnu.

Ce n'est plus le cas aujourd'hui : «Le PS est à la ramasse. Aubry ne met même plus son parti sur les flyers.» Sur son programme, l'équipe de la maire sortante a il est vrai privilégié le bleu au rose. Le nom du PS apparaît à quelques endroits sous les noms de certains colistiers et en dernière page, parmi d'autres logos, notamment ceux des communistes et des radicaux de gauche. Pour Emiliano, c'est le signe que pour la maire actuelle, mieux vaut «avancer à visage masqué pour gagner».

Photo Aimée Thirion pour

Libération