Menu
Libération
Municipales

A Nice, tracter devient un vrai CDD

La liste écolo, candidate à la mairie niçoise, assume l'embauche de tracteurs, le temps de la campagne. «On a plus d'électeurs que de militants», expliquent ses candidats.
Des gens se promènent à Nice. (Photo Valery Hache. AFP)
par Mathilde Frénois, correspondante à Nice
publié le 25 février 2020 à 15h32

La pile de tracts est bordée d'un liseré vert foncé. La disposer en éventail, c'est se rendre compte que tous les flyers ne sont pas identiques : certains abordent le «plan vélo», d'autres «l'humanité envers les animaux». L'école et la mer ont aussi droit à leur prospectus dédié. «On a décidé de faire des tracts thématiques, confirme Juliette Chesnel, candidate aux municipales pour le parti Nice Ecologique. Ça permet d'engager la conversation

«Nous nous donnons les moyens de gagner»

Surtout que, depuis décembre, certains «tracteurs» ne sont pas aussi bien renseignés sur le sujet que Juliette Chesnel, déjà conseillère municipale et figure des Verts à Nice. Son parti a, en effet, embauché 25 personnes en CDD pour tracter et animer les réseaux sociaux. Pas des militants pur sucre, des temps partiels de 15 heures, et parfois des temps pleins, payés au smic. «Après avoir postulé sur Pôle Emploi, les personnes ont passé un entretien d'embauche et ont eu une formation, précise la candidate, en deuxième position sur la liste. Chaque semaine, ils ont un briefing de l'actualité.» C'est qu'il ne suffit pas de distribuer les tracts. Il faut surtout convaincre pour récolter des bulletins supplémentaires dans l'urne le 15 mars face à Chrstian Estrosi.

«Il y a un enjeu grave pour la ville de Nice. Nous nous donnons tous les moyens de gagner la mairie, soutient Jean-Marc Governatori, tête de liste. Il fallait recruter des personnes. Moi, dans mon ADN, il y a l'emploi : embaucher me fait plaisir. Et c'est indispensable pour gagner la ville.» C'est lui qui financera avec ses propres ressources les salaires des 25 CDD, la somme passant la barre des dépenses autorisées par les comptes de campagne.

«Ce sont des gens qui ont besoin d’emploi»

Mais alors, Nice Ecologique manque-t-il de militants, et de leurs petites mains, pour coller les affiches, remplir les boîtes aux lettres et décorer les pare-brises ? «On est un parti avec plus d'électeurs que de militants. Notre adhésion n'est pas gratuite : les gens qui s'engagent doivent faire tourner le parti, pas simplement remplir une fiche avec leur nom, justifie Juliette Chesnel. Et ces gens ont un métier. On n'est pas une liste de retraités ou de chômeurs.» C'est qu'il faut du monde et du temps pour se rendre dans chacun des quartiers de Nice à la rencontre de leurs 350 000 habitants. «Ce sont des pratiques qui se faisaient partout. Avant, elles étaient illégales car c'était au black, assure un cadre du parti. Par un souci de transparence, on veut mettre de l'éthique dans notre campagne.»

Ce midi-là, Hélène Granouillac distribue les flyers dans le Vieux-Nice, avec Juliette Chesnel et Jean-Marc Governatori. La veille, cette militante venue du monde associatif, quatrième sur la liste, était sur une place voisine «avec des tracteurs» embauchés. «Je n'ai pas honte. Je n'ai pas à rougir. On a en face de nous une machine de guerre [les équipes de campagne du maire sortant LR Christian Estrosi ndlr], dit-elle. Contre nous, on a une armada avec des moyens beaucoup plus importants. On n'a rien à perdre.» Pour être embauchés, les chômeurs devaient forcément avoir une affinité particulière avec l'écologie. «Ce sont des gens qui ont besoin d'emploi, poursuit-elle. Il y a bien sûr un côté alimentaire que l'on ne peut pas nier. Mais ils sont aussi engagés.» L'une d'elles a même abandonné son contrat pour devenir pleinement militante. Elle figure désormais en 12e position sur la liste Nice Ecologique.