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Libération
éditorial

Amateurs

publié le 1er mars 2020 à 21h01

Un échec. Le recours au 49.3 décidé samedi par le Premier ministre pour faire adopter la réforme des retraites, considérée comme la plus emblématique du quinquennat, est révélateur des difficultés dans lesquelles continue de patauger Emmanuel Macron. Le chef de l'Etat peut bien sûr arguer que ce dispositif est prévu par la Constitution, précisément pour sortir de ce type d'impasse parlementaire. Il renvoie aussi, et c'est de bonne guerre, la responsabilité du blocage à la stratégie d'obstruction de l'opposition. La majorité se réjouira aussi qu'avec ce 49.3, la réforme fera cette semaine un pas important vers son adoption. Il n'en reste pas moins qu'Emmanuel Macron n'aura, malgré des mois et des mois de concertation, pas réussi à convaincre de la nécessité, encore moins des bienfaits ou de la justice de sa réforme du système des retraites, au cœur du pacte social français. Il disposait pourtant, dans les rangs syndicaux dits réformistes, d'alliés pour l'aider à convaincre. A l'arrivée, c'est l'inverse qui se produit : sa réforme divise jusqu'à sa majorité. Et l'apôtre du «en même temps» se retrouve prisonnier de vieux bons clivages droite-gauche, et contraint d'user d'une arme constitutionnelle très «ancien monde». Comment, par ailleurs, ne pas souligner l'amateurisme dont a fait preuve la majorité dans l'élaboration de ce texte. Le symbole de cette légèreté, c'est l'absence de précision sur la notion qui a donné son nom à la réforme : le point. Comment convaincre dès lors que ce noyau dur reste à ce stade encore si flou ? Enfin, si ce recours au 49.3 vient parapher les difficultés rencontrées par Emmanuel Macron dans la première moitié de son quinquennat, il tue dans l'œuf le storytelling en cours sur le Macron new look censé aborder la seconde moitié de son mandat. On nous avait promis un président plus à l'écoute, moins jupitérien. Il dégaine le 49.3. Gare à la contradiction.