«Aujourd'hui, j'ai juste besoin qu'on dise qu'il n'avait pas le droit de me faire ça.» La silhouette est frêle et repliée sur elle-même, mais le discours ferme, les mots puissants. Qu'importe si la voix flanche parfois, avalée par les pleurs ou le silence de l'émotion. Qu'importe si Jeanne (1) a dû s'asseoir pour ne pas flageoler et décrire encore, pour la huitième fois dans son combat judiciaire, et désormais devant les jurés populaires de la cour d'assises de Bobigny (Seine-Saint-Denis), les multiples viols et sévices qu'elle a subis, le 8 octobre 2017 au petit matin, après avoir invité à son domicile ce jeune homme «sympathique» rencontré quelques heures plus tôt. «Il y avait une telle haine dans ses yeux quand il m'a dit : "Ah, tu kiffes les meufs, je vais te faire kiffer"», se remémore cette femme de 34 ans, lesbienne, qui rentrait avec un garçon pour la première fois depuis des années.
Il se tient à quelques mètres d'elle, dans le box des accusés. Visage taillé à la serpe et regard perçant, Nidhal T. était jugé jeudi et vendredi pour «viol commis en raison de l'orientation sexuelle», «vol en récidive» et «tentative d'escroquerie en récidive» devant la cour d'assises de Bobigny. En dépit d'expertises médicales accablantes, l'accusé de 24 ans n'a cessé de nier les faits, à l'exception du vol de la carte bancaire de Jeanne (avec laquelle il a effectué trois tentatives de retrait) ainsi que celui de sa chevalière – qu'il revendra